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Actualité du dopage |
DES TRACES D'EPO synthétique ont été retrouvées dans les urines de Laurent Jalabert prélevées le 22 juillet 1998 à l'issue de la 11e étape du Tour de France reliant Luchon au plateau de Beille (remportée par Marco Pantani). L'information analytique, que L'Équipe est en mesure de divulguer aujourd'hui, est consécutive au même genre de tests qui ont confondu inéluctablement Lance Armstrong dans ces colonnes, le 23 août 2005. Il s'agit d'analyses effectuées par le laboratoire de Châtenay-Malabry (LNDD), devenu aujourd'hui département Analyses de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), dans le but d'assurer la robustesse de la méthode de détection urinaire de l'EPO.
À cette époque, les travaux ont été pratiqués de manière strictement anonyme. Cependant, la commission d'enquête sénatoriale, mise en place le 14 mars dernier afin de réaliser un audit sur l'efficacité de la lutte antidopage en France, a récemment récupéré auprès du ministère des Sports et autres autorités concernées les procès-verbaux nominatifs lui permettant d'identifier les coureurs prélevés. Bien dans le ton de ce que fut ce Tour des garde à vue et des descentes de police, la quasi-totalité des échantillons de 1998 réanalysés par le laboratoire francilien se sont avérés positifs à l'EPO en 2004 (1), ce qui s'explique par le fait que les coureurs ne risquaient rien en la circonstance puisque cette substance était alors indétectable (2).
Parmi les échantillons souillés figure donc un prélèvement appartenant à Laurent Jalabert, qui courait sous les couleurs et les directives de la ONCE et de Manolo Saiz, manager espagnol sulfureux impliqué puis blanchi lors du récent procès Puerto.
Selon nos informations, le seuil de 94,8 % d'isoformes basiques a été atteint lors de l'analyse de l'échantillon du Français, alors que le seuil de positivité exigé par les standards de l'Agence mondiale antidopage (AMA) était de 85 % à l'époque des réanalyses. La positivité du natif de Mazamet est donc indiscutable. Néanmoins, il ne s'agit pas d'un contrôle antidopage. Donc, à l'instar des échantillons de Lance Armstrong, cette analyse n'a en aucun cas de portée disciplinaire, a fortiori quinze ans après les faits. Jalabert ne risque aucune sanction rétroactive.
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Au pire, ce qui semble hautement improbable, aurait-il pu risquer d'être poursuivi pénalement par le Sénat, puisque lors de son audition, le 15 mai dernier, l'ancien sélectionneur de l'équipe de France masculine (2009-2013) s'est refusé à toute forme d'aveux concernant un dopage volontaire, alors qu'il déposait sous serment. Questionné durant plus d'une heure par les sénateurs et leur rapporteur, Jean-Jacques Lozach (Creuse), (...) Laurent Jalabert (...) n'a pour autant pas réellement menti, ce qui aurait pu lui valoir une sanction pénale.
Alors que dans son propos liminaire, Jean-Jacques Lozach, sénateur de la Creuse, très fair-play, lui rappelait que la commission d'enquête avait récupéré l'ensemble des procès-verbaux nominatifs du Tour 98 et les résultats des analyses, et qu'en conséquence elle était en mesure d'établir les rapprochements et d'identifier les positifs, Jalabert a opté pour une défense plutôt sibylline, assez proche de celle de Richard Virenque, auditionné le même jour devant le Sénat : « J'ai fait usage de produits quand cela était nécessaire, pour des lésions avérées, avec des autorisations. Des corticoïdes pouvaient être administrés pour soigner certaines pathologies. Je ne peux pas dire avec fermeté que je n'ai jamais rien pris d'illicite. Mais je peux assurer qu'à aucun moment je n'ai cherché à rencontrer un médecin pour améliorer ma performance ou participer à la course à l'armement. Je n'ai jamais dépensé un franc pour acheter un produit. Ce n'était pas ma culture, pas mon envie. Chez ONCE, le soir des étapes, le médecin passait, il faisait un soin, une récupération, on ne savait pas ce que c'était, c'est vrai. Alors ai-je été trompé ? Je ne le crois pas. On était soignés, mais était-on dopés ? Je ne le crois pas. » Interrogé hier par téléphone sur la réalité de ce contrôle, Laurent Jalabert a réitéré ces propos avant de s'exprimer dans les médias dont il est le consultant, France Télévisions et RTL (...). Reste désormais à attendre le 18 juillet prochain, date de la publication du rapport des sénateurs, pour connaître en annexes les identités de tous les positifs des Tours 98 et 99.
(1) Face aux résultats de détection de l'EPO effectués sur le Tour 98, le Dr Françoise Lasne a avoué depuis avoir douté un instant de la validité de sa méthode urinaire : « Il y a avait tellement de positifs que j'ai cru que notre test était totalement à revoir. »
(2) Le test EPO urinaire a été utilisé pour la première fois lors des Jeux Olympiques de Sydney (2000) en combinaison avec un test sanguin australien.
Cette page a été mise en ligne le 25/06/2013