Indice de confiance de DECEUNINCK - QUICK-STEP : 8,4
29/06/2021 - cyclisme-dopage.com - S. Huby - #TeamWatttheFuck
Après Julian Alaphilippe qui a écrasé la première étape à la Fosse aux Loups, c’est au tour du revenant Mark Cavendish de s’imposer à Fougères. Deux victoires en quatre étapes, c’est fort. Mais peut-on faire confiance à la « Wolfpack » comme l’équipe aime à se faire appeler ?
La formation belge Deceuninck-Quick Step trouve ses origines en Italie avec la tristement célèbre équipe Mapei créée en 1993. Patrick Lefevere en prend la direction dix ans plus tard alors qu’elle prend le nom Quick Step-Davitamon en 2003. Manager de la Mapei entre 1995 et 2000, puis de Domo-Farm Frites pendant deux ans, il fonde les structures de l’équipe actuelle avec des dirigeants issus des deux équipes.
Sept encadrants épinglés, Patrick Lefevere en tête !
Patrick Lefevere figure au nombre des sept encadrants de l’équipe épinglés dans notre annuaire du dopage. Sept, comme autant de péchés capitaux. Coureur professionnel entre 1976 et 1978, Lefevere a admis avoir consommé « sept à huit fois des amphétamines ». Il n’en dira pas plus sur cette période de sa vie.
Les 23 et 24 janvier 2007, le Het Laatste Nieuws publie une série d’articles sous le titre « Lefevere, 30 ans de dopage ». Patrick Lefevere s’insurge et intente un procès au quotidien néerlandophone. Il gagne. L’épisode aura tout de même conduit aux aveux d’un de ses anciens poulains, Johan Museeuw. « Je trouve juste dommage que Johan n'ait pas précisé que ni moi ni l'équipe n'étions au courant de ses pratiques de dopage », commente-t-il laconiquement.
En juin 2009, la ZDF diffuse un reportage dans lequel Patrick Sinkewitz accuse l'équipe Quick Step de s'être livré à des pratiques dopantes lorsqu'il y était coureur. L’Allemand a couru sous la direction de Lefevere pendant six ans.
« Il n’y a jamais eu de dopage organisé dans mon équipe », affirme-t-il au Het Nieuwsblad en mars 2013. Dans la foulée, il prend la défense des docteurs Eric Rijckaert et Geert Leinders : « Quand j'étais moi-même coureur, je suis allé chez le docteur Eric Rijckaert. Il m'a dit : dans quelles courses voulez-vous être bon ? Je vais vous y préparer médicalement. Mais alors Rijckaert n'a pas voulu me dire en quoi consistait cette préparation. Donc je ne l'ai pas fait. Il m'a expliqué : « Si je dis aux coureurs ce que je fais, ils le feront deux fois par semaine. Il protégeait donc les gens contre eux-mêmes, mais ce n'est pas ainsi que c’est perçu aujourd'hui. Idem pour Geert Leinders : c'est pathétique comme on parle de lui aujourd'hui ». Rappelons qu’en 2013, Eric Rijckaert et Geert Leinders sont connus pour avoir été les médecins respectifs des équipes Festina et Rabobank.
Quant au docteur Ivan Vanmol, lui aussi au passé sulfureux, Lefevere réplique en 2017 : « Van Mol, ça fait vingt-cinq ans qu’il est avec moi. Dans le suivi médical, il a toujours été au-dessus du lot. Après, on a tous fait des erreurs mais il faut voir le contexte. J’ai été éduqué par la Bible : que celui qui n’a jamais pêché me jette la première pierre ».
Les six autres péchés capitaux
Yvan Van Mol Yvan (médecin) : le médecin des équipes de Patrick Lefevere depuis bientôt 30 ans a un palmarès long comme le bras qui lui vaut un portrait sur notre site. Nous ne citerons ici que Greg Lemond. Alors dans l'équipe Gan et n’ayant rien gagné depuis 1992, il cherche à comprendre ce qui lui arrive. Il consulte le Dr Van Mol, son ancien médecin quand il était chez ADR : « Je voulais savoir si des études pouvaient expliquer ce qui n'allait plus chez moi. Le docteur Van Mol m'ausculta et ne décela rien de particulier qui pouvait expliquer ma baisse de niveau. Il me fit simplement savoir que j'avais juste besoin d'EPO, de testostérone, d'hormone de croissance pour maintenir ma compétitivité. C'est pourquoi j'ai décidé de mettre un terme à ma carrière ».
Jose Ibarguren Taus (médecin) : le praticien espagnol n’a rejoint le duo Lefevere-Van Mol qu’il y a une vingtaine d’année. Avant cela, il a pu parfaire ses connaissances au sein d’équipes plus ou moins sulfureuses (souvent plus) les unes que les autres : Euskatel-Euskadi, Lotto, Banesto, Lampre et Saunier Duval. Dès 1999, Willy Voet l’accuse de doper les coureurs de l’équipe Lotto. Il dément. Le 28 juillet 2002, aux portes de Lyon, pendant le Tour de France, un camping-car griffé Lampre est arrêté par la police. Ils y trouvent des valises appartenant au Dr Ibarguren contenant des corticoïdes, des seringues et d'autres produits suspects. Interrogé, le médecin se défend fermement : « aucune forme de dopage n'a été administrée à l'équipe Lampre », soutient-il. En 2009, il est directement impliqué dans « l’affaire Mantoue ». Les écoutes téléphoniques effectuées entre 2007 et 2009 ont mis en évidence une conversation téléphonique entre le pharmacien Guido Nigrelli et Taus Ibarguren dans laquelle ce dernier déclare : « j'ai besoin d'un petit quelque chose... () Ce que vous m'avez envoyé pour la Vuelta, j'ai continué à la maison ». Le jugement fait état d’achat et d’administration de produits dopants (le « petit quelque chose », dont de la testostérone, dans le but d'améliorer les performances des coureurs de l'équipe Fuji-Servetto (héritière de la Saunier-Duval. Nigrelli sera condamné mais Ibarguren Taus échappera à une condamnation.
Brian Holm (directeur sportif) : en janvier 1999, Holm dit avoir vu des coureurs prendre des amphétamines. Il ajoute du bout des lèvres : « Je dois aussi admettre que j'ai pris de la cortisone pour soigner des blessures ». En 2007, il pousse un peu plus loin la confession en admettant avoir utilisé de l’EPO, notamment en 1996 lorsqu’il était dans l’équipe Deutsche Telekom. Interrogé par SPN.dk en 2010, il donne un peu plus de détail tout en essayant de se dédouaner : « Quand je suis passé pro [en 1989], cela ne parlait pas tant que cela de dopage, mais plus tard, les medias ont accentué leur attention sur le sujet. Finalement, c’était tellement rentré dans la routine, que personne ne se rendait plus compte que c’était illégal. Si beaucoup de coureurs de ma génération ont dit qu’ils ne s’étaient jamais dopés, comme cela a été mon cas pendant longtemps, c’est parce que nous pensions que ce n’était pas vraiment du dopage, de la triche. () Je pense que j’aurais pu passer au détecteur de mensonge quand j’ai arrêté ma carrière, déclare-t-il. J’étais convaincu que j’étais propre. Ce n’est que plus tard que vous commencez à réaliser que cela n’était pas le cas. Car c’était devenu partie intégrante d’une routine quotidienne ».
Tom Steels (directeur sportif) : pendant le Tour de France 2019, il pousse Julian Alaphilippe dans l’ascension du Galibier et est sanctionné d’une amende de 500 francs suisses (environ 450 euros). Plus grave, si on se souvient du contrôle positif aux corticoïdes de Lance Armstrong lors du Tour de France 1999 et de l’ordonnance rétroactive qui lui a permis d’échapper aux sanctions,on a un peu oublié qu’il ne fut pas le seul. Sur ce Tour, six autres coureurs, dont Tom Steels, se sont retrouvés dans la même situation et ont bénéficié de la mansuétude de l’UCI. Cette année-là, le Laboratoire national de dépistage du dopage de Châtenay-Malabry était capable pour la première fois de détecter la substance. Beaucoup de coureurs n’avaient pas vu le coup venir. En 2013, le nom de Tom Steels refait surface dans les annales du dopage. La commission d’enquête sénatoriale révèle la positivité à l’EPO des échantillons urinaires de Tom Steels, lors du Tour de France 1998. Cette année-là, il avait remporté pas moins de quatre étapes.
Rik Van Slycke (directeur sportif) : professionnel de 1986 à 1999, un de ses rares coups d’éclat est constitué par son contrôle positif au Tour de Suède 1988.
Jo Planckaert (chauffeur VIP) : l’ancien coureur véhicule les invités de l’équipe belge. Peut-être leur raconte-t-il comment son coéquipier Philippe Gaumont parlait à son sujet en 2003. Le Français accusait alors le docteur Jean-Jacques Menuet, médecin de l’équipe Cofidis d’avoir pratiqué des perfusions d'oxyglobine, une hémoglobine synthétique, à Jo Planckaert, avant Paris-Roubaix 2003. Planckaert est rattrapé quelques temps plus tard par une autre affaire de dopage. Il est condamné en 2004 par la RLVB (Ligue vélocipédique belge), en compagnie de Johan Museeuw et Chris Peers à 4 ans de suspension dont 2 fermes et à une amende de 10.000 francs suisses (6.500 euros environ). Sur le plan judiciaire, les trois coureurs avaient été entendus comme témoins au cours d'une enquête du parquet de Courtrai (Belgique) entamée en septembre 2003 dans l’enquête visant le vétérinaire José Landuyt et le soigneur Herman Versele. Des SMS entre les différents protagonistes avaient été découverts par les enquêteurs. Des perquisitions avaient été menées au domicile des trois coureurs où, selon la presse belge, des produits interdits avaient été retrouvés. Des analyses sanguines et urinaires d'échantillons s'étaient cependant révélées négatives. A la suite de la LVB, la justice en remet une couche et condamne Planckaert, pour la même affaire, à une peine de dix mois avec sursis et une amende de 15.000 euros, dont 2.500 euros fermes. En 2006, alors qu’il tente un retour dans les pelotons, Planckaert déclare à nieuwsblad.be : « Je n'étais ni meilleur ni pire que n'importe qui d'autre. Je refuse de dire que j'avais tort. »
26 affaires impliquant 21 membres de l'équipe
La liste des affaires de l’équipe est bien remplie. Lire ici. On compte près d’une affaire par an depuis 1993 ! C’est la troisième plus grande moyenne des équipes de ce Tour de France.
Parmi les coureurs impliqués figure Iljo Keisse, toujours en exercice dans l’équipe. Le coureur est contrôle positif aux Six jours de Gand 2008. S’ensuit une longue bataille juridique au sujet de sa suspension qui passera par la Cour d'appel de Belgique et le Tribunal Arbitral du Sport. Depuis, Patrick Lefevere lui a toujours renouvelé sa confiance en le conservant dans les effectifs.
Radars éteints
Aucun coureur ni encadrant n’a allumé les radars placés sur les Grands Tours par Frédéric Portoleau et Antoine Vayer. Il faut dire que l’équipe ne vise pas le classement général de ces épreuves. « Je pense que si vous regardez le classement général des trois grands Tours et que vous regardez les croix à côté des noms, cela parle de lui-même », assénait Patrick Lefevere en 2013. Faudra-t-il s’inquiéter si Julian Alaphilippe venait à ramener la tunique jaune à Paris ?
Le MPCC, c’est non !
Deceuninck-QuickStep n’adhère pas au MPCC et ce n’est pas demain la veille. Quand Tom Dumoulin annonce quitter le MPCC, Patrick Lefevere applaudit à tout rompre : « J'ai lu cette semaine que Tom Dumoulin ne veut plus faire partie du MPCC (...). Personnellement, je ne connais pas Dumoulin, je ne connais pas ses motivations, mais je le trouve maintenant sympathique. Je ne veux pas non plus faire partie de la MPCC. Pour une bonne compréhension, je suis aussi pour le cyclisme crédible. Pour cela, nous avons le Code de l'AMA et des systèmes tels que la localisation et le passeport biologique. En tant qu'équipe, nous payons pour ça ».
Quatre coureurs intrépides adhèrent toutefois au MPCC à titre individuel. Aucun des 54 encadrants que nous avons recensés n’a ce courage.
Verdict
Pour l’ensemble de son œuvre, nous attribuons à Deceuninck-QuickStep un ICCD de 8,4/20, en zone orange, à quelques encablures du podium des pires équipes de ce Tour de France.