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Revue de presse - La mutation de Vingegaard chez Jumbo

26/07/2022 - cyclisme-dopage.com - Antoine Vayer

« Oui, en effet, la tricherie marche à tous les coups, si on prend la peine d’ajouter un bon gros mensonge ».

Voilà ce que vous devriez voir écrit dans vos journaux quotidiens, nationaux, régionaux.

Vous ne le lirez pas vraiment, c’est toutefois implicite cette année.

Cette phrase est tirée de l’album « Tyranno (le dinosaure), l’espèce de sale tricheur », un petit livre illustré pour enfants de Hans Wilhem. J’espère que Vingegaard et Thomas le feuilletteront aux leurs en lisant avec leurs doigts. Trop jeunes pour comprendre, ils les ont exhibés hier comme de vulgaires trophées sur le podium final du Tour. Cela attendrit, les petits, les grands qui ne veulent pas grandir, les spectateurs du Tour.

« Comment ça marche ? »

Aux côtés des coureurs qui, si on leur pose la question sur les éventuelles suspicions à leur égard, répondent comme Wout « c’est une question de merde, ça revient chaque année, tout le temps » ou comme Jonas « notre équipe est complètement propre » ( incomplètement on ne sait pas ce que cela veut dire), nous avons Richard Plugge.

C’est « l’Algemeen directeur », le boss, de l’équipe Jumbo Visma à laquelle ils appartiennent, tout comme le Français Christophe Laporte à qui on a quand même offert une des sept victoires de l’épreuve, général compris. Wout Van Aert, n’a pas osé en prendre une 8ème à Paris. On lui a dit que les oreilles sifflaient un peu trop. C’est une équipe qui ressemble au personnel d’un magasin Ikea à l’entrée d’une Zone Commerciale, comme partout dans le monde. A l’image de ses alter ego (énormes égos), Bruyneel de US Postal et Brailsford de Sky, le Batave régale la presse en traitant les équipes françaises et leur encadrement presque d’arriérés à tous les niveaux, un discours si classique comme le vent dans le dos permanent ou les vélos qui vont maintenant très vite. Cela expliquerait les différences : les autres sont des cons incompétents et rétrogrades. La presse s’empresse de rapporter ces paroles. Même Hinault s’était laissé convaincre un temps, qui traitait ses compatriotes de fainéants ! Bernard est loin d’être un monstre intellectuellement, mais il est sollicité sans cesse. Cela ne relève pas le niveau. Plugge a mis quand même une autre petite touche personnelle nouvelle.

This was January 2021 - the UCI haven't dealt with ketones yet.

So you have a 2 tier system: MPCC teams which don't use ketones and others which do. Jumbo-Visma's Richard Plugge claims it increases performance "by 15%".

Ketones not on WADA banned list.https://t.co/xAR7kIuFJo

— ???????????? (@cleans_letsrun) July 24, 2022

Selon lui, l’usage des cétones (Lire On cétone encore sur ce Tour de France 2020) apporterait un plus de 15% en termes de performances à ses coureurs. Bondieu, mais c’est bien sûr ! CQFD ! Quels cons ces Français qui, pour des raisons éthiques, refusent d’avaler ces produits dégueulasses ! En se référant aux dires de Plugge, cela signifie que tous ses coureurs Jumbo auraient dû finir le Tour de France à deux, voire trois heures du classement général en faisant grupetto-lâchés dans tous les cols s’ils n'avaient pas pris de cétones. Magique, ces produits ! Gaudu, t’es vraiment con, c’est vrai : + 15% ! Tu imagines !? C’est presque du 450 Watts Etalon pour toi, comme Indurain ou Pantani naguère. Essaie ! Ce n’est même pas sur la liste des produits interdits ! Tu as le droit !

+ 15% en watts = + 1% en vitesse

Sans doute est-ce la raison pour laquelle à 42,07 kilomètres par heure de moyenne sur les 3346,50 kilomètres du Tour de France, Vingegaaard a battu le record historique qui a effacé celui établi par Lance Armstrong de 2005 en 41,654 km/h, de 0.416 km/h. C’est du + 1% tout juste en vitesse moyenne ! Les Néerlandais font les choses vraiment bien. Propres on vous dit. Pourtant presque personne n’a réellement relevé ni commenté ce chiffre dans la presse. On est dans la banalité de la triche accolée au mensonge par omission. J’ai feuilleté les journaux, hors Le Figaro que je n’ai pas trouvé et Le Monde qui est le journal du lendemain fait la veille, pour lequel j’ai travaillé onze ans pendant Le Tour. Je préfère, par loyauté et pour garder quelques bons souvenirs avec l’équipe de journalistes d’avant, ne pas parler de la couverture du Tour cette année sur ce canard que j’ai consulté sur internet. J’ai honte. J’ai mal à mon ancien Monde.

Revue de presse
Source : Antoine Vayer - 25/07/2022

Vive la Belgique libre

Mais avant, j’ai lu la presse belge et un éditorial dans Vers l’Avenir de Michaël Degré.

Je vous le livre en intégralité, tant je l’ai trouvé formidable.

« Je n’ai pas regardé l’étape du Tour samedi. Mon père m’a appris, en début de soirée, via WhatsApp, que Wout Van Aert avait gagné. Je lui ai répondu que je m’en foutais. Que je m’en doutais. Que si ce n’avait été lui, c’eût été Pogacar, Vingegaard, Mohoric, peut-être même Laporte, allez savoir. Que Tom Boonen, qui avait lui aussi ramené le maillot vert à Paris en 2007, mais sans faire exploser Contador en montagne, me manquait.

Je n’ai pas regardé dimanche non plus. J’ai appris que c’est Philipsen qui avait gagné sur les Champs. J’imagine que Vingegaard a trinqué au champagne avec un Pogacar souriant, qui tranche décidément avec la tronche de six mètres de long d’un Armstrong.

Je sais que l’équipe du Danois est construite sur les ruines de la sulfureuse Rabobank. Je sais que celle du Slovène est dirigée par un super dopé des années EPO, qui fut ensuite directeur sportif d’une équipe de super-chargés des "années du renouveau", première époque. Je sais qu’Ineos, ex-Sky, celle de Geraint Thomas, troisième hier, est parvenue à faire gagner le Tour à un ex-pistard (Wiggins) avant de faire du Gallois, pourtant un "nobody", un vainqueur de Tour.

Je sais des tas de choses, parce que le vélo est une passion, que j’ai lu sur le sujet, et même vécu un Tour de l’intérieur, gagné en 2008 par un disciple de Manolo Sainz. Des tas de choses que j’écris, chaque été, sur mes réseaux. Je n’oblige personne à me lire. Il semblerait pourtant que je fasse partie des " grincheux ". Que si ça me " dégoûte autant ", je ferais mieux de " ne plus regarder ".

Dont acte. Je vous le laisse, votre Tour gigantesque, polluant, dirigé par une entreprise richissime qui n’a aucun intérêt à salir son jouet, gagné par des squelettes. Vous avez raison, si ça vous chante: oui ces gens sont des athlètes, oui si ce Tour 2022 fut le plus rapide de l’Histoire c’est forcément grâce aux " gains marginaux " déjà développés en leur temps par Bruyneel, Brailsford et consorts, oui les paysages sont magnifiques, oui les calembours de Rodrigo sont rigolos (Calais-Luia!), oui Cyril Saugrain est mignon à dire " C’est clair " toutes les deux minutes. Oui, oui, oui.

Pour ma part, j’arrête les frais. En 2023, je ne regarderai plus le Tour. Je me concentrerai sur les classiques. Parce que j’aime toujours le vélo. Parce que sur ces courses-là, ce n’est pas toujours le mieux "préparé" qui gagne. Souvent, mais pas toujours. Et parce que tant qu’à me faire prendre pour un jambon, j’aime autant que ça dure une seule journée que trois semaines complètes ».

Je me suis dit que les propos du nouveau testament Gonzo* de Hunter S.Thompson sur les journalistes sportifs étaient bien loin.

Journaliste sportifs

Alors, j’ai consulté la « presse sportive » made in France, pour voir si, comme en matière de préparation selon Richard Plugge, c’était aussi des arriérés.

Le Journal du Dimanche - Je le lisais avant. C’était avec des chroniques piquantes qui valaient le détour et des journalistes indépendants. C’est devenu un tract du pouvoir déprimant où Jean-Michel Blanquer a pu tout dire aux enseignants quand il en ressentait le besoin. Pour le sport, deux pages consacrées au Tour. L’article de base finit par : « Vingegaard n’a pas connu l’époque Bjarne Riis, lauréat 1996 La triche n’a pas détourné la jeunesse danoise du vélo. « On n’était pas fier (avec Riis et Rasmussen) alors on a fait le ménage pour protéger les générations suivantes, éclaire Jess Jensen. Nous n’avons jamais perdu la foi ». On est rassuré, c’est du Gonzo dans le texte. Un autre article est consacré à Sylvan Adams à vélo, le patron de sa danseuse, l’équipe Israel-Premier Tech avec feu Froome. Il veut le départ du Tour en Israël. Il l’aura. Avec l’argent, on se paie Le Tour. On le paie cher plutôt. Le sport est un formidable outil politique qui n'a pas de prix. Vous verrez au moment des Jeux olympiques de Paris On est encore plus rassuré, Cochonou dans la bande de Gaza, j’ai hâte.

Libération - J’ai travaillé dans les années 2000 sept ans pour ce journal en tant que chroniqueur pour le Tour en accompagnant Jean-Louis le Touzet qui manque vraiment à ce milieu. Les envoyés spéciaux font un “deux pages”. Cela commence par « Le vrai Tour du Covid-19 qui a fauché un coureur sur quatorze, le vrai Tour du réchauffement climatique, le vrai Tour des émotions etc. » Puis sept surtitres de paragraphes finement écrits parlent d’eux-mêmes : « Truffe », « Hyper-Champion », « Belote », « Stoïcisme », « Galaxie parallèle », « Rebels », « Escampette », « Guiness ». La dernière phrase, toujours importante la dernière phrase, essentielle même, c’est : « Le manager des deux (Wout et Jonas) renvoie dans les cordes les critiques sur un cyclisme à deux vitesses. Seulement deux ? ». Bien vu.

Le Télégramme - PQR de Bretagne. Tu aimes le vélo et la voile, et le sport en général, c’est une couverture formidable, ceci dit vraiment peu critique, à de trop rares moments. Ce n’est pas le crédo. C’est factuel, jamais militant. Quatre pages, des grandes photos, un « Pogacar, retour sur terre » bien senti. La ville de Paris partenaire de B&B Hôtels, l’équipe qui était bretonne, du Gaudu local qui rêve de gagner le Tour de France. Vas-y rêve David, prends des cétones et du fieulou. Et puis une page des résultats « complets » ! La page qui ne sert à rien, d’abord parce que les résultats sont complètement faussés par les tricheurs et parce que tout le monde s’en fout. La preuve, on pourrait systématiquement mettre par-ci par-là des noms, les vôtres, et des chiffres débiles, personne ne s’en apercevrait. C’est une page de perdue. On pourrait s’en servir pour des chroniques. Celles de Vaugrenard, ancien pro, étaient correctes sur ce Tour, mais sans polémique. Pas de scoop, pas de polémique dans Le Télégramme ! Tout va bien.

Ouest France - Premier quotidien français depuis 1975, 382.952 exemplaires vendus en moyenne en 2020 pour 1.379 .000 lecteurs au quotidien a aussi son cahier sports le lundi. Ses journalistes sont des mecs bien, vraiment. Ils ne sont pas idiots, ni corrompus, ni corruptibles. Le point de vue de la page d’accueil est efficace sous le « Un trio hors d’atteinte » : du Wout d’abord et « Un Maillot jaune tout aussi étonnant à l’image d’un contre la montre qu’on n’aurait jamais imaginé le voir réaliser avec son physique de crevette » terminé par « face à la suspicion, il ne peut y avoir de bonnes réponses. Même si certaines sont pires que d’autres ». On a compris, même si c’est de l’implicite et pas du frontal. Avec la p... de page de résultats, le projet B&B, cette équipe qui était bretonne, d’ autres articles paginés « Une édition record et des questions » et du Gaudu bien sûr : « Tous les coureurs sont humains ». Gaudu doit gagner deux millions d’euros. Je l’espère pour lui. Il ne va pas dire grand-chose. Madiot aimerait Van Aert à la folie. Il ne va pas dire le contraire. Il veut que son équipe gagne un peu, même quelques miettes et que Jumbo ne contrecarre pas trop leurs petites ambitions. Il est comme ça Madiot. Il braille fort, mais pas trop quand même. On ne sait jamais. Comme Ouest-France, il ne va pas titrer « Un trio de grosses chaudières, Gaudu vainqueur moral du Tour ». mais ils le pensent, tous, Madiot et le journal. Ils ont raison.

La Croix - Oui, j’ai acheté La Croix, car il faut prier pour notre salut après les performances des riches pécheurs. Une petite page aussi conclue par Jonas face au scepticisme ambiant « On est propre, je peux vous le garantir à tous et à toutes. Personne ne fait quelque chose d’illégal chez nous ». On ne demande qu’à le croire, termine le journaliste. Ce journal est un journal de vrais croyants avec des fausses sceptiques.

Le Parisien - Je ne lis ni le Parisien, ni Aujourd’hui, destiné à la province ou bien rarement. Une petite photo en page une. Une pleine page sponsorisée par Leclerc avec Jonas à pois en grand, cela a dû rapporter cher au journal, idem pour Skoda avec Wout et son petit garçon qui n’a pas encore écouté papa lui raconter l’histoire de Tyranno le dinosaure. Un classement réduit à sa portion congrue, c’est bien, mais un « Vingegaard, histoire d’une antistar » qui se conclue, après un « Pogacar s’est rendu plus humain » par un mot de sa grand-mère danoise « Il parait que séduire sa femme fut plus difficile que de terminer 2ème du Tour de France (en 2021) » puis la dernière phrase : « Pas d’impatience, le coup de foudre est donc encore possible.» Je n’ai pas tout compris. Je ne lirai toujours ni le Parisien, ni Aujourd’hui destiné à la province décidément trop bête pour comprendre le néant.

Tu pleures en lisant ton journal sportif maintenant ?
Source : Espé - 25/07/2022

L’Equipe - J’ai fini par « L’Equipe VINGEGRAAL » en une. Pourquoi n’ont-ils pas titré VINGEGAARIIS ? Parce qu’ils appartiennent à la société organisatrice ASO. C’est une Pravda. Seize pages où tout est charmant. Ce journal est complice. C’est du Gonzo pur jus. Un de ses journalistes, parce que j’avais parlé au Sénat de prostitution de la presse, était venu me voir quand j’avais organisé la rencontre Armstrong-Bassons à Paris au Fouquet’s. Il m’avait houspillé avec un air de CPE frustré et dit « Faut qu’on s’appelle et qu’on se parle ». Un vrai Parisien genre : “ on se téléphone, on se fait une bouffe, on s’enc..” Je l’ai appelé. Il avait oublié. Il s’est défilé. Sur deux pages, comme des maîtres d'écoles de banlieue triste, ils mettent des notes aux équipes ! C’est terrible. Ils ne descendront jamais de leurs minarets ou chaires d’église. Au contraire. Ils sont cyniques, comme tous ceux qui mangent dans la gamelle. Hier soir, ils sont allés se coucher tôt, après un mois de tourisme, voir maman. Ils sont (bien) payés pour mettre des notes. Les vraies notes, nous, on les a, mais ce sont des notes de crédibilité des équipes. Et les nôtres, elles sont presque tout l’inverse des leurs. Voyez plutôt : ICCD 2022 !

Indice de Confiance des équipes participant au Tour de France 2022
Source : cyclisme-dopage.com - 07/2022

Nous ne sommes pas payés, nous, et c’est tant mieux.

-* Extraits du livre Le nouveau testament Gonzo de Hunter S.Thompson.

“Les journalistes sportifs comprennent que leur petit monde risque de voler en éclats s’ils osent jamais douter que leur yeux sont branchés directement sur leur cervelet : une sorte de lobotomie de fait, qui permet à la victime souriante de fonctionner entièrement au niveau de la perception sensorielle. En dehors de quelques exceptions, les journalistes sportifs représentent une sous culture grossière et microcéphale d’ivrognes fascistes dont la seule fonction véritable est de faire connaître et vendre tout ce que le rédacteur en chef les envoie regarder. Ce qui est une manière agréable de gagner sa vie, parce que ça occupe son homme sans exiger qu’il réfléchisse une seule seconde. Les deux clés du succès pour un journaliste sportif sont : 1) croire aveuglément tout ce que peuvent vous raconter les entraîneurs, attachés de presse, putains et autres “ porte-parole officiels ” des propriétaires de l’équipe qui vous fournit les boissons gratuites. 2) Un bon dictionnaire des synonymes, pour éviter de recourir deux fois aux mêmes verbes et adjectifs ».

VINGEGAARD, vainqueur du tour à 42.07 km/h de moyenne à la loupe

La mutation de Vingegaard chez Jumbo (Avec Portoleau)

A 22 ans, alors dans une petite équipe continentale en 2018, Vingegaard remporte un contre la montre en côte sur le Tour du Val d'Aoste Espoir avant d’abandonner sur chute. La pente modeste ne permet pas une estimation de puissance précise. Un mois plus tard, mal remis de sa chute, il n'est pas au meilleur de sa forme au Tour de l'Avenir et termine 68ème de l'épreuve largement dominée par Tadej Pogacar.

Fin 2018, il signe chez Jumbo Visma et débute sa carrière dans le plus haut niveau du cyclisme en World Tour. Il aurait été repéré en battant un KOM Strava en Espagne au col de Rates (6,48 km à 5,4% en 13min02sec). La pente de 5,4% ne permet pas une estimation de puissance précise.

En 2019, il obtient une victoire significative au Tour de Pologne devant Sivakov et Hindley sur un profil d'étape favorable aux puncheurs.

En 2020, l'année du confinement, il participe en octobre à son premier grand Tour, la Vuelta. Il escalade l'Angliru en 45min23sec et concède 3min31sec à Hugh Carthy. Sa puissance Etalon est de 368 watts (5,6 w/kg pour 60 kg). Il s'agit d'une bonne performance mais loin d'être exceptionnelle. C'est la seule estimation de puissance en ascension de col disponible avant 2021.

En 2021, à 24 ans, le coureur Danois, littéralement transformé, se distingue en début de saison avec deux victoires au Tour UAE puis sur la semaine Coppi-Bartali. Il termine 2ème du Tour du Pays Basque. Ces résultats surprennent par rapport à ce qu'il avait montré les années précédentes. Il parvient même à suivre Pogacar sur la montée d'Arrate (460 watts étalon pour 12min48sec).

Il termine aussi 2ème du Tour de France derrière Tadej Pogacar. Il devait servir Roglic qui a chuté. Son niveau de performance en montagne est similaire à celui de Richard Carapaz, 3ème de ce Tour de France 2021. En puissance étalon moyenne, il est à 406 watts sur 5 ascensions. Sa meilleure performance est son ascension de Luz Ardiden avec 422 watts pour une durée de 35min47sec.

Il est encore plus fort en 2022, 2ème de Tirreno Adriatico et du Dauphiné avant une grande victoire sur le Tour de France. Au cours de cette nouvelle saison, il réalise six performances en montagne qui dépassent son niveau de l'année 2021: Solaison, la Planche des Belles Filles, Mende, le col de Granon, enchaînement Azet plus Peyragudes, enchaînement Spandelles plus Hautacam.

Le profil de puissance de Jonas Vingegaard (mise à jour à l'issue du Tour de France 2022)
Source : Frédéric Portoleau - 25/07/2022

Un équivalent à 1000m d'altitude de 473 watts Etalon !

Jonas Vingegaard renverse le Tour 2022, avec le support de toute son équipe, lors de l'étape Albertville-Col de Granon.

Sur la fin de la montée, une fois seul, le Danois développe 442 watts Etalon (6,45 w/kg si 60 kg) pendant 15min21sec. Il avale les 4,95 kms à 9.37% de pente moyenne à la vitesse de 19,35 km/h. Sur l'ensemble du col (11,43 km à 9,1%), le Danois développe 419 watts Etalon pendant 35min56sec (6,1 w/kg si 60 kg). L'altitude diminue normalement les puissances développées pour les efforts à dominante aérobie. Pas pour lui.

Le graphe suivant montre les grandes performances en altitudes relevées. Pour faciliter la comparaison, les puissances calculées ont été ramenées à une altitude équivalente de 1000m en considérant une perte de puissance de 6% tous les 1000m. Par exemple, si Vingegaard réalise 442 watts Etalon à une altitude moyenne de 2172m, alors son équivalent à 1000m d'altitude sera de 473 watts Etalon !!! C’est monstrueux.

Profils de puissance pour les cols de haute montagne
Source : Frédéric Portoleau - 25/07/2022

La montée du col de Granon de Jonas Vingegaard est une des plus grandes performances réalisées en altitude surtout que le col du Galibier a été escaladé sur un rythme très intense juste avant, en haute altitude également, le toît du Tour.

Ensuite, Pogacar, devancé au col de Granon (perte de 2min51sec en 4,95 km), passe à l'offensive dans les Pyrénées pour tenter de récupérer son maillot jaune. Vingegaard résiste à toutes les accélérations du Slovène, à la fois sur des sprints violents longs à plus de 500 watts et sur des blocs de 20 minutes sur un train très soutenu. Il parvient même à le distancer sur le final de la montée d'Hautacam, facilement, sidérant, après un relais ahurissant de son coéquipier, le sprinter Van Aert qui l’attendait.

Il gravit cette montée d'Hautacam en 36 min 39 sec. C'est 14sec seulement de plus que Lance Armstrong en 2000 quand l'Américain distançait Pantani sous la pluie. Armstrong avait cependant un vélo un petit peu plus lourd et n’avait pas bénéficié du “drafting” comme Vingegaard. L'étape de 2022 était encore plus difficile qu'en 2000 néanmoins Il y avait cette année le col de Spandelles en plus à escalader avant Hautacam, avec une puissance Etalon moyenne de 424 watts pendant 29min27sec. En puissance moyenne Etalon Vingegaard se situe à 434 watts sur l'ensemble de la montée d'Hautacam (13,47 km à 7,89%). Le Danois termine l'ascension d'Hautacam plus rapidement que Bjarne Riis en 1996. Il attaque à proximité du sommet et développe une puissance Etalon de 457 watts pendant 12min11sec (6,7 w/kg si 60 kg).

En deux saisons chez Jumbo Visma, Vingegaard est passé du niveau d'un équipier correct grimpeur à celui d'un incroyable vainqueur du Tour de France avec des performances proches du niveau de Lance Armstrong, aussi bonnes que celles de Pogacar qu'on croyait parti pour dominer pendant une décennie. Vingegaard a montré aussi un niveau de performance exceptionnel sur les contre-la-montre sur le plat avec 60 kilos seulement de poids de corps.

Il a muté comme certains l'ont déjà fait de façon vraiment surprenante, à un niveau proche de celui miraculeux, pas encore mutant. Cela viendra. Nous ne sommes pas au bout de toutes les mauvaises surprises pour le vélo qu'on aime.


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Cette page a été mise en ligne le 26/07/2022