Actualité du dopage

Obséquieuse télévision complice

19/07/2022 - cyclisme-dopage.com - Antoine Vayer

J'ai voulu regarder le Tour sur le service public

Cela commence par « A chacun son Tour ». Mais avant, c’est une quinzaine de minutes, pas moins, de publicité avec le grand classique « Comme j’aime ».

« On vous explique comment ça marche » pour payer afin de penser perdre du poids.

La redevance télévision sur le service public, c’est pareil. Vous pay(i)ez afin de voir ce que vous pensiez être du sport pendant le Tour. C’est faux. C’est du spectacle et du “people” où les commentateurs se voient plus importants que les acteurs. On le sent bien. C’est comme dans #DontLookUp . L’entreprise qui gère le Tour est totalement privée. C’est vous qui payez. Le chiffre d'affaires de la société qui organise ce Tour, en utilisant tous les services publics qui assument les risques, de la télévision aux agents de police en passant par les services municipaux, s'élève en 2020 à 195 486 311 € . 195 millions d’euros, cela fait rêver pour toutes leurs organisations. Rien que six millions encaissés au Danemark pour le grand départ. Les vacataires embauchés, eux, ont des petits paniers repas.

Faire du vélo c’est gratuit, ça dure des heures et vous pouvez voir les résultats : des kilos perdus. C’est mieux que « Comme j’aime ». Mais attention, Vingegaard en fait 60, Bardet à peine plus et il est plus grand. Ils sont presque décharnés. Nous étions à Foix, avec Laurent Luyat qui plait beaucoup aux personnes âgées. Il gère Jalabert, Pasteur, Offredo, Rousse, Ferrand, « l’historien » droitier qui parle de la blanquette de Limoux et de la collaboration comme personne. Le point est fait sur le Covid. Deux français d’AG2R, non chargés, sont encore exclus avec une charge virale trop importante, quoique asymptomatiques. C’est ballot. Quelques interviews « bonbons » sont réalisées dont une avec Bardet où il dit se sentir « super bien ». Cela promet. On a calculé, il est presque aussi fort qu’en 2016 quand il finit 2ème à 418 Watts Etalon derrière Froome à la moyenne de nos huit radars d’alors. J’avais écrit dans le Monde une chronique « Tour de France : Bardet ou l’extension du domaine du possible ? ».

Il avait moyennement apprécié. Il est trop fort jusqu’à présent. A la télévision, on évite tout ce qui peut être polémique ou même questionnant. On commente, on ne fait pas de journalisme. On plait. Il faut plaire à la ménagère de 27 à 77 ans. On se ment. On dit « très » tous les cinq mots. On s’aime. C’est du love-bombing, mais certains se détestent. Ce sont les codes. Luyat reparle du petit mot doux de Sagan à Marion. C’est cute. Puis dix minutes de retour sur la dernière semaine. Café. Commentateur, c’est vraiment un truc de fainéant.

Le direct live arrive. C’est le départ. Pasteur prend le relais de chef de bande. Luyat ne fait pas le direct. Offredo non plus. Voeckler est sur la moto, devant. Il entre en scène avec des « moi-moi-moi, aimez-moi ». Geay est aussi sur une moto, à l’arrière. Faut pas déconner. Il n’y a pas que des commentateurs sur France TV. Il subsiste quelques rares journalistes qui essaient de ne pas faire que commenter, même s’ils prennent alors le risque d’être recadrés. Ils restent derrière. Rousse ne fait qu’une chose. Elle « reconnaît » les coureurs et les cite avant tout le monde, c’est son truc. Elle joue à répète et répète sans jamais hausser son ton monocorde. 40 décibels. Pas 45, pas 35. Elle est gentille. Ma maman aime. C’est reposant. Quinn Simmons s’est rasé la barbe et essaie de rejoindre les 27 échappés. Tout le monde relève l’anecdote. « Oh ». On doit jongler entre France 2 et France 3. Il est 13h. On joue au ping-pong avec les classements, les pseudos tactiques, les impressions, le classement de la montagne dont le règlement change tout le temps, qui va gagner, combien de points dans la côte de 4ème catégorie, les classements annexes. Tout le monde s’en fout. Ma mère s’en fout. Elle ne connaît aucun coureur, encore moins un commentateur.

Mais comme des milliers de gens, elle se laisse bercer. Elle regarde les paysages. C’est un immense interlude pour personnes cacochymes.

Reste ceux qui comme moi, font semblant de s’intéresser, espèrent.

Franck Ferrand en PLS...
Source : Espé - 19/07/2022

On s’ennuie, constamment. On a envie de fuir et de ne revenir que pour la dernière heure en laissant les Ehpad regarder et écouter vaguement.

Voeckler intervient pour parler de la deuxième vague d’échappés. Pasteur lui dit qu’il est bon.

On a de la chance. Pas d’images d’onanisme en direct. Seulement celles des coureurs.

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J’avais plein de trucs à faire. Mais un de mes favoris de cœur, le Russe Vlasov peut être virtuel maillot jaune. Le russe c’est 455 Watts Etalon à Villars sur Ollon sur le Tour de Romandie qu’il a gagné cette année. Il a aussi gagné le Tour de Valence, pris une 3ème place au Tour du Pays Basque comme sur la Flèche Wallone et un leadership au Tour de Suisse après une victoire d’étape à 450 watts. Il n’a perdu qu’à cause du Covid. Il aurait dû être au niveau du podium. Il a un peu déçu au départ du tour. Un russe qui gagne le Tour, ce serait un sacré clin d’œil. Personne ne prononce le mot « Russe ».

C’est la reprise et les commentaires sur la pause pipi de Pogastrong. Il fait 34°. Il fait chaud, il fait très chaud. Ferrand salue son ami Laurent Voulzy. Endogamie, entre-soi, népotisme, « je connais des artistes », c’est là. Voeckler dit qu’il fait 37° et explique pourquoi les coureurs font pipi malgré la chaleur et la sueur. « Le coureur « rétentionne » et pisse quand même ». C’est un expert qui pourtant a eu du mal à pisser à certains contrôles. On n’entend plus Marion. Elle est partie au petit coin, sûrement.

Un reportage intégré sur les poches de glace aide un peu les commentateurs. Avant la glace, c’était pour conserver l’EPO dans les glacières. Jalabert n’en dira jamais rien. Les experts, c’est sur TF1. On a encore droit, comme une ritournelle, aux cinq minutes de « La route se partage » avec Voeckler puis Jalabert qui précise qu’il faut bien mettre le clignotant avant de doubler. On ne sait pas si c’est pour les vélos qui doublent les motos sur le Tour ou le contraire. Or, tous ceux qui font du vélo et de la voiture, tous les adhérents de la Fédération des Usagers de la Bicyclette (FUB) le disent : « La route ne se partage pas, elle s’aménage ». Ils ont tout faux. Mais sans doute est-ce une campagne de publicité de l’Etat qu’il faut bien passer.

Débat chez France TV
Source : Espé - 25/06/2021

Puis c’est le : “ Pour gagner 2000 euros pendant un an tous les mois il faut appeler le 34-35 ou envoyer un SMS ”, surtaxé, en répondant à la question : « Qui est le Français dans les cinq premiers du classement général ? ».

Ma mère ne sait pas. Ou elle dirait Bernard Hinault et perdrait 10 euros. Quels cons jouent à cela ? Beaucoup paraît-il. Cela rapporte. Forcément. Cela revient toutes les 20 minutes avec Pasteur. Il doit toucher des royalties, c’est pas possible.

Page de pub, 15 minutes. Marion peut retourner au petit coin ou répondre à des questions de Closer pour un portrait sur Le “Tour de France femmes avec Zwift”. C’est le naming de l'épreuve qui partira dimanche. Elle sera « directrice », Marion. On aurait dû l'appeler « Tour de France femmes avec Zwift, Krys ,Vittel, Orange, Le Coq Sportif, Enedis, Century 21, NTT, Tissot, Shimano, Ag2R La Mondiale, Antargaz, Named Spor, Cochonou, Puget, Lesieur, Le Coq gaulois, Senseo, Yamaha, Bananes de Guadeloupe, Leclerc, Sodexho, Domitys, Haribo, etc. etc », non ?

Je reçois plein de courriers électroniques. On me pose des questions. Je n’ai pas répondu à une d’hier : « Est-ce que si elle faisait 70 kilos et portait du 95C, elle serait là la dame ? ». Je n’ai pas répondu. C’est sexiste.

Ce n’est rien quand tu ne sens rien.

Rien n’échappe à l’œil de Marion. Des patchs de corticoïdes ?

Voeckler s’emmerde ou veut faire les titres de l’Equipe.

Ferrand embraye sur les châteaux cathares de 1244. Je n’en peux plus des pèlerinages. Là, je vais m’endormir. Marion n’intervient plus. Elle a dû s’enfermer dans les toilettes. Alors, je quitte la course à la TV. Il y a parfois d'immenses trous de 20 secondes. Je reviendrai à la montée du Port de Lers. Geay nous dit que Soler vomit. On va filmer son agonie devant le camion-balai. Je commenterai, je dirai : « Il ne va pas lancer de missile, Soler ». Mais personne ne comprendrait.

Comme j'ai l'habitude de passer mon mois de juillet sur le canapé
Source : Espé - 19/07/2022

Je reviens. On est au pied du Port de Lers. Encore des images de Soler devant le camion balai. Il ne se passe rien. Vlasov et Caruso, 4ème et 2ème du dernier tour d’Italie ne sont pas encore échappés de l’échappée ? On parle de la Saga des Martinez, le grand-père Mariano, le père Miguel et le fils Lenny. C’est bien ça. Les chiens ne font pas des chats et l’arbre ne tombe jamais loin de l’arbre. Mais ça dure 30 secondes. Le « qui est le Français dans les cinq premiers du classement général, Gaudu ou Bardet ? Appelez le 34-35 ou envoyez un SMS » revient. Puis, pub. Je n’en peux plus. Marion a dû boire un diurétique de Caruso enfin parti seul devant dans le Port de Lers, le premier des huit cols pyrénéens que les coureurs vont monter ces trois jours.

Marion ne pipe mot pour l’ancien amour de sa vie. Maintenant, c’est Loulou.

Il fait chaud, il fait très chaud. On re-re-re-prend des nouvelles de Soler, pointé à 24 minutes de la tête

Dans le Port de Lers, les échappés explosent. Van Aert, ce coquin passe 2ème. Vlasov déçoit. Caruso et Teuns veulent faire oublier leurs perquisitions. On est comme lobotomisé. Les comptes d’apothicaires de Jalabert avec Marion pour le classement du grimpeur nous montrent qu’ils ont peut-être eu une mention “assez bien” à leur brevet des collèges.

Jajaphilippe
Source : Espé - 19/07/2022

Enfin la course s’anime les deux premiers s’attaquent. On oublie l’échappée devant. On relit notre chronique d’avant-hier.

Pasteur, le seul à suivre de manière un peu passionnée, a pris 10 décibels suite aux deux attaques de Pogastrong dans la montée du Port de Lers et à celle dans la descente. Puis il répète : « Qui est le Français dans les cinq premiers du classement général, Gaudu ou Bardet ? Appelez ou envoyez un SMS ». J’ai trouvé, c’est Thomas Voeckler !

PUB

Je regarde sur l’appli France TV. Pas de commentaires pendant la pub. Pas de pub. C’est génial. Je viens d’avoir un autre Romain au téléphone, un follower cycliste informaticien (un peu fan, il faut bien le dire, mais de ce qu’on fait, nous). L’an prochain, je constitue une équipe de bénévoles débrouillés, disponibles en juillet, et on fait une couverture télévision et média indépendants, genre je commente la dernière heure et vous regardez les images. Si cela vous intéresse, contactez- nous. On fera un Zoom en septembre.

Hugo Houle a attaqué devant dans notre terrible col radar de Péguère. Ensuite, il y a « le groupe Madouas, le groupe maillot vert, le groupe maillot jaune ». On comprend mieux avec les codes couleurs. Chez nous, vert, c’est humain. Jaune c’est suspect. Bardet est revenu mais il est à la hauteur de Froome. Gaudu a du mal. Pas bon, ça. Jalabert la ramène avec le record de Péguère. Il se plante. Voeckler a dû prendre de la caféine, il n’arrête pas de parler. On plaint Bardet.

Geay : « il cravache, Romain, voit Pinot mais il n’arrive pas. Énoooorme souffrance. Il s’accroche ». On voit quand même les canadiens, Houle « qui n’a jamais gagné de course », puis plus loin, Woods, passer en tête en haut de Péguère. Jalabert est content. Il compte les points du classement grimpeur, comme un autiste. Tout le monde s’en fout. Personne ne sait qui est le meilleur grimpeur. Personne.

On pleure Bardet mais Gaudu n’est pas trop mal. « Un top 5 est possible ce soir pour Gaudu ». Alors on sent que ça va un peu mieux. Rien sur le fait que Pogastrong n’attaque pas « Il est à fond, il ne peut plus attaquer ». Restent Kuss, Pogastrong, Vingegaard.

Il chronomètre les ascensions ! On va embaucher Jaja.

Pause pub dans la descente. On ne sait pas où sont Gaudu-Bardet

Bardet est à trois minutes.

C’est fascinant. Le doublé de l’équipe ISRAEL Premier Tech

qui a changé de nom.

Pasteur parle longuement de l’accident mortel du jeune frère du vainqueur Houle.

Des morceaux d’anthologie télévisuelle.

Les victoires de Steve Bauer, qui a porté le maillot jaune, avec qui j’ai couru la mi-août bretonne et de Hesjedal, peut-être le premier coureur canadien à gagner un grand Tour (le Giro) sont évoqués. Pas les moteurs.

Houle dédie sa victoire à son frère. C’est la story du jour. C’est fini, l’étape.

Et là ! Paf, on revoit Luyat. Merde !

Une heure quinze de « Vélo-Club », il promet. Merde !

Il attaque d’entrée

Il présente le sommaire.

5 minutes de pub !

Profil type du nouveau commentateur sportif sur France TV
Source : Espé - 03/07/2021

Marion est (très) émue aussi dit-elle. On a du mal à la croire.

Jalabert y croit encore « Il descend bien, s’il s’échappe ». On rêve. Tout le monde dit oui et pourquoi ils y croient encore.

On a du mal. On voit quelques interviews. Gaudu qui a sauté dans le radar mais est revenu dans la descente. Il est 5ème au classement général. Madouas qui fait deuxième. Ils sont ambitieux. Ils ont parlé de plaisir d’être sur le Tour de France. Personne n’a relevé. Le bonheur ne paie pas.

Et puis et puis Luyat, en parlant à Ferrand, dit :

Là, j’éteins. Il reste 45 minutes, je n’en peux plus. C’est trop. J’ai fait des efforts. J’ai eu l’impression d’écouter les commentaires d’une épreuve de golf de niveau interrégional.

Bardet a perdu presque trois minutes dans notre radar, Gaudu s’est fait distancer même s’il est revenu dans la descente. C’est réjouissant, de fait.

Dans le Mur de Péguère, depuis Massat, notre Radar 5/7, on a calculé : 26’52’’ pour Pogacar, Kuss, Vingegaard et Quintana, 416 watts Etalon. On avait prévu 25min35sec (440 watts étalon et 6,3 w/kg) en cas de rythme intense dès le pied et avec des attaques de favoris du Tour dans la partie finale. En cas de col « escamoté », le meilleur temps prévu était de 27min45sec (400 watts étalon et 5,7 w/kg). On est au milieu des deux estimations.

Pogastrong n’est pas brillant, on trouve. Bardet, fatigué, perd environ trois minutes. Sa moyenne sur nos radars passe en dessous de 410 watts étalon. C’est bien. Il est humain. Sans doute vertueux. Gaudu est encore à 412 Watts Etalon. Peut moins bien faire. Pas mieux, on l’espère. Quintana, on sait pour lui.

Pour le Mur de Péguère 2022, c’est mieux qu'en 2017 : 13’41’’, 15,83 km/h sur une pente à 11,86%. C’est du 441 watts Etalon. 6,3/6,4 w/kg. En 2017, c’était 13’50’’. En 2019, c’était 14’07’’, quand Pinot fait son numéro au Prat d'Albis.

On sait qui triche. La télévision publique aussi. Nous, on le dit. On est bénévole.

Mais quel merdier ce sport...
Source : Espé - 19/07/2022

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Cette page a été mise en ligne le 19/07/2022