Actualité du dopage

On en voit de toutes les couleurs, mais on rit jaune


16/07/2012 - lemonde.fr - Antoine Vayer

Le Tour a retrouvé des couleurs. Le vert d'abord. Celui du maillot de Sagan, dit "Hulk". Il mime son superhéros après ses victoires (déjà trois au compteur). Le morphotype du Slovaque et sa puissance sont confondants de ressemblance. 2 minutes 20 secondes à 493 watts sur la montée de Seraing pour conclure à grands coups de deltoïdes surdéveloppés avec 1 236 watts ! Phénoménal !

Plus foncé, le vert "Europcar" : Voeckler et Rolland ont piloté victorieusement les échappées dans les Alpes (...). Trop fort ! Le premier a fait pleurer la France parce qu'il n'a pas pu faire de vélo pendant huit jours et était "incertain". Il a retrouvé, à l'âge du Christ, sa forme de 2011, où il avait augmenté son potentiel de plus de 8 % en moyenne sur les cols. Sur l'ascension du Grand Colombier (17,3 km à 7,18 % en 50 min 25 s d'ascension), il lui a suffi d'une accélération de 12 min 30 s à 408 watts étalon pour éparpiller l'échappée et conclure à Bellegarde en se jouant comme un junior de cadets. Le second, sous antibiotique après sa chute, mais vainqueur à La Toussuire, a dépensé 7 500 kcal dans la journée, soit l'équivalent nutritionnel de 77 bananes, et a fini comme son compère dans un état de fraîcheur remarquable.

Ensuite, c'est le noir, obtenu par un mélange de huit coureurs absorbant chacun une longueur d'avance sur les autres, combinés de manière à tous les absorber : Sky. Trop beau ! Porte, équipier modélisé, contrôle à distance, seul, les échappées, comme dans le col de Richemont avec 425 watts de puissance développée pendant 15 min 10 s. Rogers sait annihiler l'attaque d'Evans avec 420 watts pendant 11 minuntes dans le col du Glandon. Froome bat ensuite le temps record de Sastre lors de la montée de La Toussuire en 45 minutes. Il datait de 2006, l'année "Landis". C'est seulement de six secondes, remarquez, avec 412 watts sur le final pendant 11 minutes. C'est qu'il a dû attendre son leader Wiggins, après presque cinq heures de course et quatre cols.

(...)

C'est donc le rouge. La teinte vue par les meilleurs experts, les coureurs eux-mêmes. Dans leur patois "off", c'est du "foutage de gueule" (sic). On ne peut être plus clair pour dire comment on apprécie un tableau quand on a été peintre soi-même. Kashechkin, pour percer les secrets des Britanniques, a bien essayé le plateau "ovoïde" que les Sky et Millar utilisent. Mais son mécano l'a monté à l'envers. Résultat : une perte de puissance de 10 %. Pas de chance pour cet ancien exclu pour transfusion sanguine qui cherchait à remplacer le biomédical par la biomécanique.

Millar, en bleu, l'ex-dopé prêcheur a réussi avec son plateau ovoïde monté à l'endroit. Il a vu le vélo en rose à Annonay devant le blanc AG2R de Péraud qui ne peut pas pousser plus de 380 watts en col. (...)

Le mélange qui a dominé les Alpes, c'est le rouge de la colère retenue, le jaune écrasant du leader et le bleu des repentis. La Grande Boucle va virer au marron si cela continue dans les Pyrénées.

La couleur n'est pas une caractéristique physique liée à un objet. La couleur, c'est le résultat, au niveau cérébral, de l'interaction de la lumière du Tour, de l'objet Tour et du spectateur. Tout le système de vision est impliqué, jusqu'au cerveau. Si on veut rester naïf malgré les chiffres, on entre dans le domaine du fonds de commerce du dopage. On rit jaune.


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Cette page a été mise en ligne le 16/07/2012