Actualité du dopage

Le vélo, un sport individuel d'hypocrites qui se pratique, las, en équipe (#4)

04/07/2023 - cyclisme-dopage.com - Antoine Vayer - #TeamWattthefuck

Trop souvent, la complicité affichée entre les coureurs en interne, vendue par la communication en externe au sponsor (c'est “l'esprit d'équipe”), au public, consiste las en un pacte de détestation mutuel, tacite, larvé.

Netflix - Saison 2 - L'amour retrouvé
Source : Espé - 04/07/2023

Albert Jacquart qui était contre tout type de compétition à part contre soi-même me disait : « La seule puissance, c'est de transformer ce qu'il y a dans la tête des autres, c'est de les faire réfléchir, c'est d'être présent en eux par le regard, par la parole. Les vrais puissants sont ceux qui ont la parole. Et la parole est la vraie puissance. La vraie puissance, c'est sûr, il ne faut pas en abuser ».

Tous les compétiteurs en cyclisme ont au fond d'eux-même un seul objectif : « baiser » les autres, comme ils disent, qu'ils soient adversaires ou bien coéquipiers avec le même maillot. Si l'intérêt est financier on peut s'entendre, certes, éventuellement, mais pour garder sa place ou la faire. Le reste est du double langage sauf pour les stars de la mythomanie qui croient vraiment en leurs propres mensonges. Ils sont capables, en face de vous, de s'injecter des produits dans les veines, de vous regarder droit dans les yeux et de vous dire : “je ne me pique jamais”.

Chez Festina jusqu'au Tour 1997, « le groupe vivait bien » comme on dit partout. Puis, une partie du « sous-groupe Tour » s'est mis à pourrir tous les adversaires de manière arrogante. Ils se sentaient surpuissants, au sens propre comme au sens figuré. Ils abusaient, avec l'effet du combo substances injectées et/ou avalées en grand nombre + gloire médiatique. Pour quelques coureurs, le mélange benzodiazépine et alcool, le soir, aidait à oublier toutes les saloperies faites ou dites la veille. Pour certains, dans l'encadrement, à leur côté, le pot belge boostait en levant toute inhibition. Ils ont commencé à se moquer du peloton entier qu'ils dominaient, fors Ullrich et la Team Telekom. La chute est venue en bonne partie à cause de cette arrogance non dissimulée, de ce manque total d'humilité. Puis, alors que tous les gains pendant les courses, les primes, étaient comme d'usage mis dans un pot commun, répartis en parts égales fonction des jours de course disputés entre les 24 coureurs, ce qui soudait les liens, ce petit groupe Tour des « barons », que j'appelais « les Dalton », a convaincu le manager qu'ils n'avaient plus à mettre leurs énormes gains de ce Tour 97, si réussi, dans le pot commun. Ils voulaient ne le garder que pour eux. À partir de là, tout a commencé à se déliter entre les coureurs et l'encadrement. Le leader Virenque, jugé trop con pour gagner le Tour 1998, a été prévenu qu'Alex Zulle, un Suisse-Allemand arrivait, officiellement pour l'aider à le faire. En fait, les barons ont bien compris que c'était pour le gagner et pas pour soutenir. Ils l'ont tout de suite traité de « boche ».

« La grande famille du vélo : un leurre »

Dans la plupart des équipes, cela fonctionne de la même manière. En façade, on parle de copains d'abord, pas d'amis. En réalité, ce ne sont que courtisans et leaders qui ne rêvent que de la chute de leur voisin. A cet égard, l'histoire cette année de Gaudu le grimpeur et Démare le sprinter est révélatrice. Le Picard de 31 ans, 1m81 – 76 kilos, a gagné 91 courses dans sa carrière, la quasi-totalité au sprint, grâce au sacrifice d'une bonne partie de l'équipe, son « train », dévote à son service pendant 12 ans chez FDJ. Au point où sur le Tour de France 2017, en perdition mais attendu par trois coéquipiers du train, il est arrivé hors délai avec eux. Un traumatisme pour l'équipe. Le grimpeur breton de 26 ans, 1m72 – 57 kilos, a fait 4ème du Tour 2022 (et il est le vainqueur moral, les trois premiers sont fake). Il est dans l'équipe depuis 7 ans et a aidé Pinot auparavant. Il a mangé son pain noir. C'est le grand espoir français pour les grands tours. Il est en position de force. Le groupe classique de Démare de l'équipe FDJ est connu pour se souder afin de ridiculiser, railler, harceler les jeunots et ceux qui n'appartiennent pas à leur caste. Mais Gaudu a la main : le Tour recouvre tout. Nous sommes dans une transition pour cette équipe. Il se lâche en janvier sur un réseau, de manière vraiment stupide certes, ce qui ne dénote pas de sa part, disons, une grande finesse. Il passe des dizaines d'heures par mois à faire des jeux vidéos. Il se venge d'années de sévices et de services.

Extraits ( sans les émojis) : « Il a failli me mettre à terre y'a pas longtemps », « il a pas voulu monter dans l'ascenseur parce que « y'a Gaudu », « il remonte pas dans mon estime », « Bah moi je veux pas qu'il vienne au tour », « Donc bon Netflix ou pas on s'en blc », « « La guerre est pas finie, on est en croisade, l'avantage c'est qu'on se parle pas, et on roule pas ou presque ensemble », « Ooof tu sais. Si il veut que je lui dise en face je peux très bien. J'ai pas peur de lui. Il sait que j'en veux pas au tour je lui ai déjà dit », « Ptdr », etc.

David Gaudu se lâche sur Arnaud Démare 1/3
Source : Discord - 29/01/2023
David Gaudu se lâche sur Arnaud Démare 2/3
Source : Discord - 29/01/2023
David Gaudu se lâche sur Arnaud Démare 3/3
Source : Espé - 29/01/2023

David Gaudu le grimpeur a gagné le bras de fer malgré deux récentes victoires de Démare en juin en Mayenne et à Bruxelles. Le Picard va quitter l'équipe. On a cru à l'union parfaite pendant des années. C'était factice. Madiot le manager est un maquignon qui fait avaler une foultitude de couleuvres. Gaudu s'est vengé. Le breton aime la vengeance froide. Démare est humilié à son tour. C'est le “Vengeance miss Ratched” préquel féministe du film “vol au dessus d'un nid de coucous”. Nous n'en sommes pas loin, du moins.

Partout, c'est ainsi.

Jasper Philipsen qui a été emmené deux fois par Mathieu Van der Poel, mué en équipier, pour une deuxième victoire d'affilée sur ce Tour lui chiera bien dans les bottes un jour. C'est le jeu.

Notez que, comme hier, je vous avais aussi prédit cette deuxième victoire bien en avance - tout est si prévisible.

Ce que je vous écris est VRAI.

Albert Jacquart ajoutait : “Par la parole on crée la connivence, on crée la ferveur, on se crée les uns les autres”.

En cyclisme, on ne parle pas. On roule. On baisse la tête. On fait des watts et du blé. On s'épie.

A partir de trois, un groupe de coureurs, c'est une bande d'hypocrites.

L'idéal, c'est d'être moins de deux.


Sur le même sujet


Cette page a été mise en ligne le 04/07/2023