Brève

La métamorphose de Remco Evenepoel


06/01/2023 - cyclisme-dopage.com - Marc Kluszczynski

Les performances de Remco Evenepoel (Quick-Step Alpha Vinyl) avaient déjà surpris au Tour de Norvège fin mai 2022. D’après le site Lanterne Rouge, le jeune belge aurait développé 6,5 W/kg pendant 30 min 23 à la fin de la 3ème étape dans la montée du Gaustatoppen-Stavsro (10,5 km à 8,7 %). Il est même estimé à 6,85 W/kg pendant 15 min. Jay Vine (Alpecin-Fenix) est flashé à 6,34 W/kg pendant 30 min 49. Cependant, le vent était favorable. Mais on ne sait pas si un facteur de correction a été utilisé comme le fait ChronoWatts. De nombreux coureurs ont donc battu leur record de watts durant cette troisième étape. Après sa victoire finale au Tour de Norvège et ses 6,5 W/kg, qu’allait nous réserver Evenepoel ? Ayant récupéré de sa chute lors du Tour de Lombardie 2020 dans la descente du mur de Sormano, il déclarait après sa victoire de Liège-Bastogne-Liège le 24 avril qu’il était « plus explosif qu’avant ». Il avait placé un démarrage dans la côte de la Redoute (2 km à 18%) à 29 km de l’arrivée, comme l’avait fait Joseph Bruyère en 1978. En puissance, son attaque avait été extrêmement brutale, d’une valeur proche de celle d’un sprint, sans doute près de 900 watts pendant quelques secondes. Evenepoel (qui gagne comme Primoz Roglic en 2020 Liège-Bastogne-Liège à sa première participation) ne convainquait pas avec ses explications fumeuses du genre : « Je peux désormais attaquer puis garder des hautes données de puissance » ou encore « J’ai gagné des muscles plus explosifs après ma chute du Tour de Lombardie ». A Liège (cette année, c’est le deuxième triplé belge depuis 1976 avec J. Bruyère, Freddy Maertens et Frans Verbeeck), il expliquait « s’être concentré sur son effort pour garder la même puissance ». Cela paraît trop facile ! Evenepoel s’était bel et bien métamorphosé, mot employé par son directeur sportif, Patrick Lefevere fin mai.

La Vuelta (du 19 août au 11 septembre derniers) allait encore le montrer. Il est vrai qu’il a été avantagé par l’abandon de nombreux favoris, dont Primoz Roglic sur chute, comme au Tour de France. Le jeune belge de 22 ans se révèle maintenant être un coureur complet. Lors de la sixième étape (Bilbao-Ascension Al Pico Jano San Miguel de Aguayo 181,2 km), il est devenu l’égal des meilleurs grimpeurs, finissant à 15 secondes de Jay Vine. Il gagne ensuite le contre-la-montre de l’étape 10 (Elche-Alicante 30,9 km) devant Roglic, puis la dix-huitième étape. Dans les autres étapes de montagne, il s’avère être le meilleur des prétendants au général.

L’apothéose (et l’étonnement) arrive le 25 septembre quand Evenepoel conclut sa saison entamée par une victoire en février au Tour de la Comunidad Valencia (du 2 au 6 février) avec le titre de champion du monde. Une jambe au-dessus de tout le monde (selon Romain Bardet), il place deux démarrages à 59 puis à 56 km de l’arrivée, puis une attaque décisive à 25 km pour lâcher Alexey Lutsenko. Il réédite l’exploit d’Eddy Merckx (1971), de Bernard Hinault (1980) et de Giuseppe Saronni (1982) vainqueurs la même année d’un monument, d’un grand Tour et du Championnat du Monde. La métamorphose de Remco Evenepoel est réellement sidérante. Une perte de poids de quelques kilogrammes ne peut à elle seule l’expliquer.


Marc Kluszczynski est pharmacien
Il est titulaire du diplôme universitaire de dopage de l'université de Montpellier (2006)
Il est responsable de la rubrique "Front du dopage" du magazine Sport & Vie et collabore à cyclisme-dopage.com


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Cette page a été mise en ligne le 06/01/2023