Actualité du dopage

Aux Jeux de Rio, la grande passoire des contrôles antidopage


28/10/2016 - lemonde.fr - Yann Bouchez et Clément Guillou

Les observateurs indépendants présents aux JO ont rendu un rapport accablant sur l'efficacité de la lutte contre le dopage pendant la compétition.

Le Comité international olympique (CIO) a une foi inébranlable en l'athlète : lors des Jeux olympiques de Rio, en août, son programme antidopage était si mal organisé qu'il fallait avoir l'éthique chevillée au corps pour ne pas céder à la tentation.

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La lecture de ce rapport (disponible ici en anglais), souvent fastidieuse, recèle quelques perles. Heureusement, nous sommes allés les pêcher pour vous.

71,38 %

C'est la proportion d'athlètes n'ayant jamais été contrôlés au cours des Jeux. Une part qui n'affole pas les observateurs, étant donné que la mode est désormais à la qualité plutôt qu'à la quantité.

5

Les cinq premiers de chaque épreuve devaient impérativement être contrôlés. Cette disposition avait pour but de prévoir les cas où une médaille devait être réattributée à la suite d'une disqualification pour dopage. Mais cela n'a été fait que dans les sports les plus à risque, et encore, pas pour chaque épreuve.

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4 125

C'est le nombre d'athlètes inscrits aux JO qui, à quelques jours de la cérémonie d'ouverture, qui n'avaient pas été contrôlés une seule fois depuis le début de l'année (plus d'un tiers des participants). Parmi eux, 1 913 étaient engagés dans l'un des dix sports où le risque de dopage est le plus important. Ce chiffre met en exergue les différences de traitement entre athlètes. A titre d'exemple, les sportifs français présents aux Jeux de Rio ont tous été contrôlés au moins une fois en 2016 avant d'arriver au Brésil.

Il faut relire ce chiffre pour en saisir la portée : près de 2 000 athlètes pratiquant les sports les plus touchés par le dopage n'ont pas été contrôlés dans les sept mois précédant les Jeux.

453

C'est le nombre de chaperons (ou escortes) recrutés dans le cadre des Jeux de Rio. Mais beaucoup ont quitté leur poste en cours de compétition. Ces petites mains de l'antidopage ont un rôle essentiel, puisque ce sont elles qui conduisent les sportifs vers l'agent de contrôle du dopage, afin que les tests puissent être faits. Mais les observateurs indépendants de l'AMA soulignent que ces chaperons sont loin d'être assez formés. « Dix sessions d'entraînement ont été organisées, à Rio et Sao Paulo. Cependant, assister à ces sessions n'était pas obligatoire », est-il noté dans le rapport. Les formations, de toute façon, ne sont pas satisfaisantes et n'incluent « pas d'évaluation pratique ».

Ces chaperons, qui « souvent ne parlaient pas ou peu anglais », étaient souvent inexpérimentés. « Durant les Jeux, des tests ont été compromis à de nombreuses reprises car un nombre significatif de chaperons ne se sont pas présentés, ou se sont présentés avec beaucoup de retard. Cela signifie qu'il n'y avait pas assez de chaperons pour informer et escorter les athlètes qui devaient être testés, et (...) des tests prévus ont dû être annulés. »

Conséquence de leur manque d'expérience et de formation, certains chaperons perdaient de vue l'athlète entre la notification de son contrôle et son test au poste de contrôle antidopage - ce qui est précisément leur mission.

En plus d'une surcharge de travail, de la mauvaise organisation et d'un manque de formation, ils n'étaient pas vraiment bien traités. Un exemple, parmi d'autres, du peu de considération à leur égard : le rapport note « l'échec à leur fournir des tickets repas en nombre suffisant après de longues journées de travail ».

0,5

Certains jours, plus de la moitié des tests inopinés prévus au village olympique ont été annulés car les chaperons n'arrivaient pas à trouver les athlètes. Dans le système de localisation Adams, beaucoup de sportifs ont renseigné « village olympique », sans plus de précision. Des chaperons se sont ainsi retrouvés à errer dans le gigantesque complexe composé de 31 tours, un peu perdus. Les comités olympiques nationaux devaient normalement fournir les numéros de chambre des sportifs, mais beaucoup ne l'ont pas fait, et n'ont pas été sanctionnés.

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52

C'est le nombre d'autorisations d'usage à des fins thérapeutiques (AUT) accordées pendant les Jeux par un comité d'experts nommés par le CIO. Aucune demande d'AUT n'a été refusée, et 44 de ces AUT ont été approuvées de façon rétroactive, après l'administration du traitement.

Les AUT ont fait irruption dans l'actualité sportive avec la révélation par les pirates informatiques Fancy Bears de centaines d'AUT accordées ces dernières années à des athlètes participant aux Jeux de Rio.

16

C'est le nombre d'échantillons revenus positifs durant les Jeux olympiques de Rio, dont certains concernaient le ou la même sportive. Cinq échantillons positifs étaient couverts par une AUT.

6

C'est le nombre de contrôles subis pendant les Jeux par un athlète dont le nom est tenu secret. Il s'agit très probablement de Michael Phelps, sextuple médaillé à Rio. Quatre-vingt-dix-neuf sportifs ont été contrôlés chacun au moins trois fois à Rio.


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Cette page a été mise en ligne le 01/11/2016