Wiggins : corticoïdes « à l'insu de son plein gré »
Bradley Wiggins vient d'en finir avec une période difficile de sa vie. Il a traversé la faillite (2023), l'échec de son équipe cycliste (2015-2016), un divorce (2020), l'addiction à la cocaïne et l'alcoolisme. Son ami Lance Armstrong l'a aidé. Le vainqueur du Tour de France 2012 explique dans une seconde autobiographie (The chain, Harper et Collins, octobre 2025) ses rapports avec le dopage et règle ses comptes avec l'encadrement de la Sky pour laquelle il a roulé entre 2010 et 2015. On se souvient que des hackers russes (Fancy Bears) révélaient en 2019 les AUT de Wiggins pour des corticoïdes à base d'acétonide de triamcinolone, le Kenacort retard, prétendument prescrit pour des allergies.
Le mythe des gains marginaux, avancé par le patron de la Sky, Dave Brailsford, était dès lors remis en question. L'UKAD a enquêté et découvert des achats de gel de testostérone. Seul le médecin de l'équipe, Richard Freeman, a été condamné. D'après Wiggins, les AUT le concernant étaient demandées sans son accord, que ce soit pour les Tour de France 2011 et 2012 et le Giro 2013, ou pour son record de l'heure de 2015. Il accuse dans son livre les dirigeants de la Sky d'être responsables des soupçons de dopage dont on l'accable maintenant. Il révèle que tous les cyclistes de l'équipe étaient sous corticoïdes avant un grand Tour pour perdre 5 à 6 kilos en quelques semaines. Mais Wiggins n'explique pas pourquoi il a finalement ingurgité ces corticoïdes « à l'insu de son plein gré ».
Le Tramadol, antalgique opioïde, était aussi utilisé en Pro-Tour, notamment par Sky, d'après les révélations de Michael Barry dans son livre Shadows on the road (2014). Le Dr Freeman le distribuait aux coureurs comme on distribuait des bonbons aux enfants. Cet antalgique n'était pas encore interdit. L'UCI le bannit en 2019, et l'AMA en 2024 seulement !
Horner : corticoïdes à gogo
Chris Horner a remporté la Vuelta en 2013, à l'âge de 41 ans. L'ex-lieutenant de Lance Armstrong chez US Postal devient alors le vainqueur de Grand Tour le plus âgé de l'histoire du cyclisme. Sur sa chaîne Youtube, Horner élude l'emploi de corticoïdes et justifie celui des antalgiques. Il avoue avoir pris beaucoup de Tramadol, pas interdit à l'époque. Mais d'après lui, le Tramadol provoque un gain de poids (ce qui est faux) et les traumatismes qu'il a subis apportent une rétention d'eau, ce qui est encore faux. Il ne dit pas un mot sur son usage de corticoïdes qui, eux, provoquent des œdèmes. L'ex-pro Phil Gaimon a écrit dans son livre Draft Animals (2017) qu'Horner avait remporté la Vuelta 2013 grâce aux corticoïdes qu'il ingurgitait pour un problème au genou ayant nécessité une opération quelques mois auparavant. L'année suivante (2014), sa nouvelle équipe Lampre avait dû le mettre au repos huit jours pour cortisolémie effondrée. L'américain révélait enfin son usage de cortisone suite à une chute au mois d'avril lors d'un entraînement autour du lac de Côme. Cette chute lui perfora un poumon. La bronchite chronique en résultant devait probablement provenir de son usage de corticoïdes en 2013, alors qu'il déclarait en 2014 devoir utiliser ces produits pour soigner cette bronchite.
Comme pour de nombreux cyclistes, cet usage en continu signera la fin de sa carrière.
Marc Kluszczynski est pharmacien
Il est titulaire du diplôme universitaire de dopage de l'université de Montpellier (2006)
Il est responsable de la rubrique "Front du dopage" du magazine Sport & Vie et collabore régulièrement à cyclisme-dopage.com