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Actualité du dopage |
CHRONIQUE. 1969. Merckx gagne son premier Tour de France. Le film Le Cerveau sort. Trailer : entre Bruxelles et Paris, un train transporte des fonds secrets. Des deux côtés de la Manche, deux individus cherchent à les voler. Côté français, un petit truand débrouillard avec un copain (Belmondo-Bourvil). Côté britannique, le cerveau (David Niven), brillant escroc disposant d’une équipe de spécialistes et de moyens considérables. 2019. Merckx est fêté au départ du Tour. Pitch : le Français Alaphilippe essaie de chiper l’or du maillot jaune, conseillé par Virenque, mais c’est le team Ineos, ex-Sky, de David Brailsford, le tout-puissant manageur de l’impressionnante équipe britannique, qui va encore chiper le jackpot d’un septième Tour victorieux.
Ce qui frappe dans ses hommes de main, Bradley Wiggins, Christopher Froome et Geraint Thomas depuis huit ans, c’est leurs corps faméliques. Tous ont un rapport poids minimal-puissance maximale capable de forcer tous les coffres-forts de la montagne. Tous ont perdu 10 % de leur poids.
Ineos suit les règles. (...) Il a été reproché à Wiggins et Froome l’usage – avec autorisation à usage thérapeutique – de corticostéroïdes qui contribuent à l’affûtage rapide, octroyant euphorie et puissance. Mais peut-être n’est-il pas nécessaire de prendre des corticoïdes, des hormones thyroïdiennes ou des anabolisants comme les bêta-mimétiques qui favorisent l’amaigrissement en boostant le métabolisme de base.
La piste de l’Aicar (...) a été écartée. Comme celle de l’usage de clenbutérol (ce produit vétérinaire qui augmente la masse musculaire, tout en diminuant le taux de graisse, qui a valu une suspension de deux ans à Alberto Contador), ou encore du salbutamol.
Nouveau carburant de luxe
Les fichiers de mon lanceur d’alerte sur l’équipe Sky révèlent autre chose. L’équipe britannique a été précurseuse du « low carb » (pour low carbohydrate), dès 2011 : il s’agit d’optimiser l’organisme et de l’entraîner à brûler du gras sans manger de sucres, pour faire descendre la masse grasse sous les 6 % et faire tourner les muscles avec des lipides.
Ces fichiers montrent que Wiggins a roulé des heures à ce régime sans glucides la semaine qui précède son Paris-Nice victorieux en 2011. Il craque deux fois avec du café-croissant. Les 10 janvier, 10 février et 10 mai 2014, Froome décrit par le menu le contenu de ses sorties de 6 h 45, 6 h 35 et 7 h 33 comme étant « close to perfect low carb » (« proche du parfait low carb »). Il descend de 74 kg à 68,4 kg.
L’avantage d’épuiser ses sucres, si on arrive en outre à se restreindre en protéines, est que l’organisme produit des corps cétoniques (ils sont synthétisés à partir des graisses) qui fournissent aussi de l’énergie. Des industriels ont réussi à fabriquer de façon artificielle ces cétones identiques à ceux produits par notre organisme. L’absorption de ces cétones exogènes, associée au low carb, a constitué un nouveau carburant de luxe.
Désormais, on aurait trouvé mieux en associant prise de cétones et de glucides. C’est le dual-fuel protocol comme le Maurten, boisson à base d’un mélange de sucres et de dérivés d’algues permettant d’augmenter les apports sans contraindre l’intestin. Les muscles brûlent à la fois des cétones et du sucre, situation antiphysiologique mais efficace pour le vélo. Associé à la caféine, ce serait le combo idéal pour carburer sur les pentes du Tour. Et la pince-monseigneur pour fracturer la chambre forte qui mène au magot ?
En novembre 2018, nous révélions la courbe de poids de Chris Froome entre novembre 2010 et juillet 2014. Selon ces données, le coureur britannique serait même descendu à 66,8 kg pendant le Tour 2012. Des courbes à retrouver ici.
Cette page a été mise en ligne le 18/07/2019