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Actualité du dopage |
Ulcéré par la gestion de l'affaire Chris Froome, le manager de Groupama-FDJ, qui est aussi président de la Ligue nationale de cyclisme, en tire les leçons.
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Installé dans un fauteuil en cuir du Château de La Barbinière, près de Cholet, le Mayennais avait évoqué après un rapide aparté sur ses racines paysannes et le sort des agriculteurs «dont Paris ne parle jamais», le sacre bleu-blanc-rouge d'Anthony Roux, dimanche dernier, à Mantes-la-Jolie. (...)
Face à nous, il se la joue calme mais à l'intérieur, il est ulcéré, dépité et bout d'un feu mal éteint sous les cendres de l'affaire Chris Froome qui semble lui gâcher quelque peu son plaisir. Une fois encore, on étrille le cyclisme. Mais, pour lui, il s'agit moins de fustiger le Britannique que l'Agence mondiale antidopage, qui a bien mal géré cet imbroglio juridico-sportif qui le laisse atterré. «Je suis né dans une famille catholique, mais aujourd'hui, je n'ai plus foi en l'AMA», avait-il lancé en apprenant la nouvelle. Il s'en explique.
«Avant que Froome soit blanchi, seul Bernard Hinault s'était révolté sur les ondes contre les lenteurs de la justice sportive, lui seul avait élevé la voix, ce qui est plutôt surprenant...
Parce qu'Hinault était dans son rôle, après, bien sûr, il aurait pu s'abstenir, se dire qu'à son âge tout cela ne le concerne plus, mais je le connais, le Blaireau, il a toujours la fibre, il voulait alerter l'opinion, désigner le malaise, défendre le Tour, dire, "attention, n'abîmez pas ce qu'on a construit de génération en génération". À intervalles réguliers, le Tour en prend plein la gueule. Pour autant, ce n'est pas Froome le problème, c'est l'AMA, à qui Roger Legeay, le président du MPCC (...) demande régulièrement de réguler l'usage du tramadol, des corticoïdes et qui reçoit chaque fois, en retour, un petit courrier très sympathique disant "nous allons mandater une commission d'experts", après quoi, il ne se passe rien.
Vous avez une explication ?
Non, mais ça me gonfle, on s'est trimballé un problème pendant neuf mois, tout ça pour s'entendre dire, à la veille du Tour, que Froome est blanchi. On nous prend vraiment pour des cons ! En septembre, je vais créer une sorte d'académie, à Besançon, pour de jeunes aspirants professionnels. Mais moi, quel discours, quelle éducation je vais pouvoir leur donner, à ces jeunes ? Je vais devoir leur dire, la dose maximale de salbutamol autorisée est de 1 000 nanogrammes, mais si vous en avez 2 000 dans vos analyses, c'est pas grave et puis, si vous avez de l'argent, ne vous inquiétez pas, vous serez blanchi.
Si tu es riche, tu t'en sortiras...
En gros, c'est ça, mais moi, comme tous les autres managers, je donne de l'argent à l'AMA. Chaque année, je verse 120 000 euros à l'UCI, pour eux, pour l'antidopage, sans parler du suivi longitudinal. En échange, je m'attends à ce qu'on m'apporte de vraies réponses, mais pas qu'on me dise "je ne sais pas", "on verra". Oui, là, il y a vraiment un souci.
En reconnaissant que son test sur le salbutamol n'était pas fiable, ce test qui a jadis condamné Alessandro Petacchi et Diego Ulissi, l'AMA installe le doute sur sa crédibilité...
Et c'est terrible, car on n'avance pas. Et le pire, ce qui me gêne, c'est que, cette fois, le malaise n'est pas né d'une intervention de la police, comme on en a connu (pendant l'affaire Festina, par exemple). Là, c'est l'AMA, à qui nous crions au secours, l'AMA, censée réguler notre sport et donc régler le problème, qui nous plante, alors oui, j'ai perdu foi en cet organisme.
Froome est là, sur le Tour, blanchi, mais le problème est-il résolu ?
Il l'est au moins pour lui, mais il faut se rendre à l'évidence : cette affaire en ouvre une autre, encore plus importante.
Vous en avez discuté avec les responsables de la Sky et son manager Dave Brailsford ?
Je n'ai aucune relation avec eux et on pourrait se retrouver dans le même hôtel, se croiser dans l'escalier, on se saluerait mais on ne se parlerait pas.
Vous auriez peut-être intérêt à le faire...
J'ai des réticences avec Brailsford, quand il dit qu'à la Sky il fait "plus et mieux" que le MPCC, je me demande, et Roger Legeay avec moi, pourquoi il n'y adhère pas?
Et l'UCI dans tout ça ? Qu'attendez-vous de son président, David Lappartient ? Qu'il arbitre un peu mieux la vie du cyclisme ?
Il a tout pour entrer dans l'histoire, les conditions sont là (Énigmatique...), c'est à lui de jouer. S'il échoue, il finira aux oubliettes et ne sera pas réélu.
Froome, conspué, injurié lors de la présentation des équipes, c'est inquiétant? Peut-on craindre qu'un spectateur l'agresse, comme Eddy Merckx l'a été, en 1975, dans le Puy-de-Dôme ?
Je ne crois pas, je connais la France profonde et le public du Tour, les gens ont toujours été calmes et respectueux des coureurs. On ne leur fera pas avaler des couleuvres, il y aura sûrement des sifflets, les plus virulents brandiront des pancartes, mais ça s'arrêtera là. Chez nous, le Tour est une communion et face aux soupçons de dopage, on n'a pas forcément les mêmes opinions, pas forcément les mêmes croyances mais à la fin, on s'en va tous chercher l'ostie.»
Cette page a été mise en ligne le 16/11/2022