Actualité du dopage

Dopage du centenaire: un cas, un seul


28/07/2003 - Libération - Blandine HENNION

Les vitesses de pédalage étant supérieures aux années EPO, il faut constater que d'autres dopants indécelables se sont généralisés. Patrice Clerc (...), le président d'ASO, la maison mère de la société du Tour de France, trouvait qu'une Grande Boucle sans aucun cas positif était irrémédiablement suspecte. (...) Si cette année, une clavicule cassée a remporté une étape usante dans les montagnes basques, l'an prochain, il faudra un meilleur spectacle. Pourquoi pas un unijambiste triomphant sur les Champs-Elysées ? Hier, l'Equipe a donc révélé que l'édition 2003 est bien dans les clous requis par l'éthique : on a trouvé un cas positif, à l'EPO recombinante. Un sur les 90 contrôles effectués et sur 198 coureurs au départ. L'honneur est sauf.

(...) Bien sûr, il ne s'agit pas d'un gros poisson (...). On ne peut pas salir le podium tous les ans. L'an dernier Raimondas Rumsas, le troisième du général, s'était illustré par la saisie de sa pharmacopée par les douaniers de Chamonix dans le coffre de la voiture de sa femme, le soir même de l'arrivée. L'affaire avait ridiculisé les pauvres médecins contrôleurs du Tour de France. A plusieurs reprises, ils avaient fait faire pipi au coureur lituanien de la Lampre, sans que jamais le laboratoire de Châtenay-Malabry puisse crier au positif à l'EPO. Ce sont pourtant six seringues pleines de cette hormone dopante ­ par augmentation du volume de globules rouges dans le sang ­, qui avaient été trouvées dans la voiture de son épouse, placée en détention. C'est sur le Giro 2003 que Rumsas a enfin fait tourner l'échantillon d'urine. (...) Cette année, on a failli célébrer la cinquième couronne d'Armstrong sans même une overdose de Salbutamol, ce médicament contre l'asthme dont le peloton raffole et qui est autorisé sur ordonnance. On a donc frisé la honte absolue car le Tour 2003 est le plus rapide de l'Histoire et a battu pléthore de records de vitesse dans les ascensions.

On se perdait en conjectures hier sur l'identité du coureur positif. Ce dernier a demandé une contre-expertise dont les résultats devraient être rendus publics en milieu de semaine. Sachant que ces examens prennent une dizaine de jours, le coureur a dû être contrôlé à la onzième ou douzième étape. Quel smicard du vélo aux médecins incompétents s'est-il fait pincer le doigt dans la porte ? (...) Au conseil de prévention et de lutte contre le dopage (CPLD), qui reçoit tous les résultats des contrôles, on n'était au courant de rien hier. «Le CPLD est en vacances. Nous prendrons connaissance des résultats aujourd'hui. (...) Une guerre des communiqués entre l'Union cycliste internationale (UCI), sous la responsabilité de laquelle s'effectuent les contrôles classiques du Tour, et la haute autorité française avait eu lieu lors des premiers tours post-Festina. Tout est rentré dans l'ordre. Au ministère de la Jeunesse et des Sports qui diligente aussi des contrôles inopinés, le conseiller de permanence tombait de sa chaise, tout comme l'inspecteur de l'UCI sur le Tour.

(...) Tout cela appelle plusieurs réflexions. D'abord, les vitesses de pédalage étant supérieures aux années EPO de la décennie 90, force est de constater que d'autres dopants indécelables se sont généralisés dans le peloton. Pis, l'EPO, démodée et décelable depuis trois ans, est devenue la dope du pauvre. Les experts en pharmacologie font en effet état de nouvelles hormones peptidiques dont l'effet dopant ne nécessite plus de longues cures en amont des courses à étape, comme c'est le cas pour l'EPO recombinante classique. Une seule injection permet de doper un coureur pendant une étape, les traces dans l'urine étant très éphémè res. D'autres nouvelles méthodes de dopage par manipulation sanguine et autotransfusion inquiètent également les experts de la lutte antidopage. Ces méthodes ne sont pas plus décelables. Les hormones de croissance, apparues il y a une quinzaine d'années dans le peloton, peuvent aussi continuer leur carrière. Aucune politique de santé publique ou de politique sportive n'a jugé utile de financer des tests de dépistage. Seuls les stimulants (caféine, cocaïne, etc.), les corticoïdes et le salbutamol sont habituellement recherchés. (...) Sur les Tours ultérieurs au scandale Festina, le CPLD a déploré jusqu'à la moitié du peloton adepte de ces différents traitements. Tous ont pu justifier de dossiers médicaux recevables. Seul Igor Gonzalez de Galdeano a été interdit de Tour du centenaire par le CPLD pour avoir abusé de ces produits sans justification médicale en 2002.


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