Actualité du dopage

Vingt des plus grands cyclistes accusés de dopage par un juge italien


16/12/1999 - letemps.ch - Guillaume Prébois

Une liste d'une vingtaine de noms accompagnée d'un jugement sans appel signé par les professeurs Plebani, Cazzola et Ferrara, trois scientifiques italiens de renom: «Tous dopés.» C'est la conclusion de l'enquête conduite depuis près de deux ans par le magistrat Spinosa (Parquet de Bologne) sur le discuté professeur Michele Ferrari et ses «patients». La liste contient les plus grands noms du cyclisme mondial : Ivan Gotti, Mario Cipollini, Paolo Savoldelli, Pavel Tonkov, Beat Zberg, Axel Merckx mais aussi des «retraités» comme Tony Rominger et Claudio Chiappucci. Le professeur Plebani (Université de Padoue) révèle: «On a observé des variations de paramètres sanguins qui ne peuvent s'expliquer par des causes naturelles mais seulement par la prise de produits.» Les substances évoquées sont l'EPO et l'IGF1, une hormone de croissance. Les fiches cliniques saisies lors de la perquisition de la pharmacie bolonaise Giardini Margherita démontraient des «sauts» inexplicables d'une dizaine de points du taux hématocrite et une présence de fer «anormale» (ferritine) dans les organes vitaux que sont le foie, le pancréas et la rate.

Un grand pas

Cela pourrait sembler un détail. Il s'agit pourtant d'un pas de géant dans la lutte contre le dopage : Spinosa a décidé de transmettre les conclusions de son enquête au C.O.N.I (Comité olympique national italien). C'est une première en matière de collaboration entre la justice pénale et celle sportive. Tout a commencé il y a un mois, au cours d'une interview, le magistrat Pierguido Soprani déplorait le peu d'intérêt manifesté par les instances dirigeantes sportives sur les résultats des enquêtes en cours. Le message ou plutôt l'appel fut aussitôt entendu par le Foro Italico et le lendemain l'avocat du C.O.N.I Giacommo Aiello envoyait une lettre à tous les parquets demandant expressément la transmission des dossiers.

C'est désormais chose faite. Les documents arriveront demain et le C.O.N.I a prévu de les étudier lors d'une réunion la semaine prochaine. Au cours de la procédure pénale, Spinosa a mis en examen 16 personnes dont certains directeurs sportifs et Michele Ferrari en personne pour «administration de produits dangereux pour la santé sans ordonnance

En l'absence de loi sur le dopage (toujours en discussion au parlement) il était en revanche impuissant contre les athlètes considérés comme «personnes lésées». La transmission des données de l'enquête au C.O.N.I change radicalement la situation. Sur la base de l'avis des experts, le Comité olympique pourrait décréter des suspensions pour les sportifs concernés. Des suspensions qui seraient immédiates si les procès verbaux des interrogatoires recueillis par le juge devaient contenir des aveux de coureurs. Le football est également touché puisque Spinosa avait séquestré les fiches médicales des joueurs du club de Parme lors de l'été 1998. Fiches dont les valeurs hématologiques étaient suspectes (le gardien avait un taux d'hématocrite de 53). «Pour les footballeurs on ne peut être aussi affirmatifs que dans le cas des cyclistes parce qu'il nous manque des données», explique le professeur Plebani.

La lutte contre le dopage s'organise donc en Italie. Le C.O.N.I a rendu obligatoire pour tous les athlètes italiens les tests de sa campagne «Moi je ne risque pas la santé» fondés sur non plus sur le seul hématocrite mais sur l'analyse de cinq paramètres. N'oublions pas que d'ici peu les juges Soprani (enquête sur Conconi), Guariniello (enquête sur Pantani et la Juventus de Turin) et Giardina (exclusion de Pantani du Giro) rendront leurs conclusions publiques avant de les transmettre au C.O.N.I qui aura la responsabilité de sanctionner au cours d'un nouveau millénaire qui s'annonce mal pour le sport en général.


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Cette page a été mise en ligne le 23/12/2022