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Calculs de puissance |
Il a beaucoup été question des calculs de puissance ces derniers jours, à la fois sur le Tour de France ainsi que sur La Flamme Rouge.
Je vous rappelle que je crois fermement que ces calculs sont suffisamment fiables pour constituer une arme de plus dans la lutte contre le dopage. Avec les avancées en matière de science de l'entrainement ainsi qu'en matière de capteurs de puissance, on peut aujourd'hui connaître précisément les capacités d'un athlète. Enfin, les calculs de puissance comme ceux de Vayer et Portoleau me paraissent également suffisamment fiables pour être utilisés en course, en l'absence de l'obligation des équipes de fournir les données réelles de leur SRM.
Par souci de transparence et d'honnêteté intellectuelle, il convient néanmoins de rendre compte des critiques récentes à l'endroit des calculs de puissance.
Frédéric Grappe estime pour sa part qu'il est malhonnête de conclure que Chris Froome est dopé sur ce Tour puisque sa puissance apparaît logique avec celles qu'il dégageait déjà lors de la Vuelta 2011. Il émet également des réserves quant à la précision des calculs de puissance, estimant que les variations possibles sont trop grandes pour permettre de conclure quoi que ce soit.
Je rejoins son opinion sur un point: la prudence. Je vous rappelle que les calculs de puissance peuvent à mon avis servir à identifier les coureurs suspects, pas à les déclarer positifs!
Grégoire Millet, professeur en biomécanique à l'Université de Lausanne, émet lui aussi des critiques à l'endroit de ces calculs, estimant qu'il s'agit "d'enfumage". Il estime la marge d'erreur des calculs de puissance entre 6 et 14%, soit une marge trop élevée pour que ces calculs puissent être utile.
Bref, le débat fait rage parmi les experts. Je serais tout de même tenté de dire qu'Antoine Vayer et Frédéric Portoleau ont les faits empiriques de leur côté: tous les coureurs dont la puissance a été estimée supérieure à 410 watts ont été piqués au contrôle durant ces 15 dernières années. Si la précision est lacunaire, peut-être que la corrélation - ou l‘épreuve des faits - ne l'est pas!
En attendant, l'idée d'utiliser davantage les capteurs de puissance pour établir un profil "physiologique" des coureurs et ce, dès leur arrivée chez les pros, fait son bonhomme de chemin. La ministre des Sports en France, Valérie Fourneyron, vient de s'inviter dans le débat en demandant à l‘équipe Sky de rendre publiques les données de leurs capteurs, question de faire taire la polémique actuelle.
Malheureusement, il faudrait l'intervention de l'UCI pour faire avancer le dossier. On peut nourrir des inquiétudes à ce sujet pour les prochains mois...
Que conclure alors?
Sur une seule étape, peut-être que les calculs de puissance manquent de précision. Mais sur l'ensemble d'un Tour de France voire d'une saison, ils devraient être suffisamment cohérents pour pouvoir non pas affirmer que tel coureur est dopé (ce n'a jamais été le but), mais bien pour identifier les coureurs suspects, et donc devant faire l'objet d'une attention particulière par la patrouille anti-dopage.
Et je demeure convaincu que les grands champions sont prévisibles, donc que des coureurs arrivant à augmenter significativement leur niveau en quelques saisons sont suspects. Les exemples de Claudio Chiappucci, Bjarne Riis, Evgueni Berzin, Vladislav Bobrik, Giorgio Furlan, et tant d'autres encore sont éloquents à cet égard. Mais il convient également d'ajouter ici, encore par honnêteté intellectuelle, que l'entraineur français Michel Thèze a déjà affirmé que Chris Froome, alors stagiaire (avant 2008) au Centre mondial du cyclisme de l'UCI, possédait une VO2max très importante, associée à une puissance également très importante.
Bref, pas de conclusions hâtives, mais de la vigilance et du jugement! Attendons la suite de la semaine avant de poursuivre.
Cette page a été mise en ligne le 18/12/2013