Brève

3 Heures VTT d’Arcachon : l’épreuve mobilisée contre le dopage


17/02/2019 - sudouest.fr - Julien Duby

C'est l'histoire d'un malaise comme il en arrive parfois sur certaines épreuves sportives et plus particulièrement des courses de vélo. Cette histoire a eu lieu l'année dernière sur les 3 heures VTT d'Arcachon. Un pilote se présente au départ : si le gros du public et des participants ne le connaissent pas, les organisateurs et quelques autres concurrents, beaucoup plus initiés aux choses du cyclisme, savent que l'individu est alors soupçonné de dopage au point de faire l'objet d'une enquête et qu'il a très mauvaise réputation dans le milieu cycliste du grand Sud-Ouest.

Que faire ? Rien. Il n'y a rien à faire, sans preuve, ni condamnation. Juste laisser la course se dérouler et admettre qu'on ne peut pas empêcher un coureur de s'aligner au départ de l'épreuve et d'y briller. Christophe Bassons, ancien coureur cycliste professionnel, désormais vététiste et chargé de la lutte antidopage dans la région, avait prévu de participer à l'épreuve dont il est aussi le parrain. Mais la présence de cet individu, qu'il connaît très bien dans le cadre de sa mission à la Direction régionale de la jeunesse et des sports, est vécue comme une provocation, un défi à son combat contre la triche. Bassons ne peut rien faire, sinon renoncer à participer.

« Je ne pouvais pas prendre le départ de la course à côté de ce coureur. Les organisateurs étaient démunis, mais je considère qu'on peut réagir, au moins individuellement, et faire ce que l'on croit être juste, dans des moments pareils », estime celui qui n'avait pas hésité, en 1999, à s'élever contre le dopage encore généralisé dans le peloton cycliste professionnel, quitte à sacrifier sa carrière.

Face à ce forfait de dernière minute, les organisateurs sont évidemment désorientés, démunis. L'épreuve qu'ils ont bâtie se retrouve otage d'une approche du sport qu'ils ne cautionnent pas. « On se demande depuis des années ce que l'on peut faire si des personnes pas très justes se présentent au départ de notre épreuve. Nous avions déjà eu des doutes sur certains, dans le passé. Et on ne veut pas ce genre de contexte malsain », résume Eric Ventre, président d'Océan-Oxygène, l'association qui organise la course. Alors l'épreuve, soutenue et un peu guidée par Christophe Bassons, a décidé de réagir après cet épisode malheureux. (...)

Civisme et bonheur

La course arcachonnaise (qui aura lieu dans une semaine) a donc réuni ses principaux partenaires afin de définir un chemin vers lequel elle souhaitait aller. C'est ainsi que l'UFOLEP (...) mais aussi le comité régional de cyclisme de Nouvelle-Aquitaine et la direction régionale de la Jeunesse et des sports (le Ministère des sports) et enfin Tecno globe, le sponsor-titre de la course, se sont réunis début février à Bruges pour signer une convention.

Il s'agit là de proposer une charte de bonne conduite et de bonne pratique aux concurrents, de mettre en place un stand de sensibilisation aux risques du dopage, d'engager, notamment avec les jeunes, une réflexion sur la quête d'une forme de bonheur dans le sport, sans moralisation. Une réflexion sur la notion de performance sportive et le civisme dans la pratique. Le tout couronné par une récompense pour un participant qui se serait mis en valeur.

Une énième convention bourrée de bonnes intentions ? Peut-être pas. Plutôt une union sacrée pour mettre la pression sur les fauteurs de troubles éventuels, d'autant que rien n'obligeait cette épreuve peu médiatisée à se prêter aux habituelles mascarades de certains grands événements... Cette mobilisation des partenaires commerciaux et institutionnels autour de l'organisation est née d'une colère et d'un ras-le-bol.

Laurent Guimard, dirigeant de Techno Globe, le sponsor principal de l'épreuve, est prêt à se fâcher avec quelques clients du monde du vélo s'il le faut. « À un moment donné, si l'on soutient le sport, on ne peut pas fermer les yeux sur ce qu'on voit. Même si nous sommes là pour communiquer sur notre entreprise, on ne doit pas oublier notre responsabilité sociale et sanitaire. »

À écouter Jean-Jacques Moze, président de l'UFOLEP 33, les tensions que l'on ressent aujourd'hui dans la vie de tous les jours ont rejoint le monde du sport.

« Pour ce qui concerne le dopage, nous avons eu dans notre fédération des rumeurs sur certains individus, mais je pense que le ménage a été fait. En revanche, nous constatons de plus en plus d'insultes et de menaces sur les épreuves. Des dérives comme je n'en ai jamais connu durant ma longue carrière de sportif... » Élargir à des courses sur route

Son alter ego Vincent Dedieu, président de la Ligue Nouvelle-Aquitaine de cyclisme, reste sur le terrain de l'éthique, où sa discipline a été (et reste) très chahutée. Sa démarche, de s'associer à une épreuve qui combat ouvertement le dopage, pourrait lui valoir quelques inimitiés dans un milieu encore très conservateur. Mais il ne veut pas lâcher l'affaire. « J'aimerais que l'on puisse aller sur d'autres épreuves avec un discours fort sur les valeurs, l'éthique. Pourquoi pas sur une grande course amateur sur route ? » Bon courage à lui, quand on connaît les discours d'arrière-garde qui sont encore tenus sur le bord de la route...


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Cette page a été mise en ligne le 07/05/2020