Actualité du dopage

Les dessous du dopage face aux juges


20/03/2013 - charentelibre.fr - avec AFP

Mickaël Larpe, l'ancien cycliste pro charentais, comparaissait hier avec son père, son frère et un ex-infirmier militaire pour dopage. La procureure a requis deux ans de prison avec sursis à son encontre. Délibéré le 9 avril.

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Hier, trois ans après ses deux contrôles antidopage positifs à l'EPO, trois ans après sa mise en examen, le cycliste charentais a entendu Stéphanie Veyssière, procureure, réclamer deux ans de prison avec sursis à son encontre. Contre son père, qui a reconnu avoir fait des «injections d'EPO» à son fils, elle a requis un an de sursis. Et six mois de sursis planent sur la tête de Sébastien, le frère, qui endosse la responsabilité de l'introduction du dopage dans la famille. Contre Laurent Dibling, ex-infirmier militaire présenté par les Larpe comme le fournisseur d'EPO et d'hormones de croissance, Stéphanie Veyssière a également requis deux ans de sursis. Les quatre prévenus seront fixés le 9 avril. (...) La Fédération française de cyclisme et l'Agence française de lutte contre le dopage ont de leur côté demandé chacune 5 000 euros de dommages et intérêts.

Pendant plus de quatre heures, les juges d'Angoulême ont mis leur nez du côté obscur du sport. Celui où la pharmacologie se mêle au fric, où l'on parle autant de protocole de dopage que de protocole d'entraînement. EPO et hormones de croissance en guest stars, ordonnances trafiquées en guise de sésame pour s'ouvrir les portes du paradis. C'est à cause de l'une de ces ordonnances, d'un moment de panique au comptoir de la pharmacie de Soyaux pour obtenir de l'EPO, que les trois cyclistes se sont retrouvés à la barre.

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Mickaël Larpe n'a pas fui. «J'étais fou. J'étais pris dans mon truc. Il n'y avait personne pour me dire d'arrêter.» Il a expliqué, balancé. Les premières injections avec de l'EPO et des hormones de croissance à l'été 2009. «L'équipe Cofidis m'avait contacté. Je voulais avoir des résultats», dit l'homme, 28 ans aujourd'hui, qui à l'époque roulait pour le Roubaix-Lille Métropole de Cyrille Guimard.

Les premiers shoots ne donnent rien. «J'en ai parlé à Fabien Taillefer, un coéquipier. Il m'a dit que lui fonctionnait avec de fausses ordonnances.» En quelques clics, Mickaël Larpe bidouille de fausses ordonnances sur son ordinateur. «J'ai trouvé des modèles sur le net.» Puis il hérite d'un nouveau coéquipier, Clément Lhotellerie, déjà suspendu pour dopage. «Il m'a dit que la première fois, on avait dû me refiler du faux EPO, mais qu'avec le vrai, ça marchait.» Dans le même temps, Guimard lui annonce que le club ne prolongera pas son contrat après la fin de la saison 2010. «J'étais en stress. J'ai fait les fausses ordonnances.» Et il s'est dopé, a écumé les pharmacies, partagé de l'EPO avec Lhotellerie, suspendu lui aussi.

Michel Larpe, le papa, 53 ans, ex-pro aussi, toujours fondu de vélo, jamais loin des pelotons, a donné le coup de main. «À ma demande», dit Mickaël comme pour dédouaner son père. «Quand j'ai su, je n'étais pas surpris, mais c'était déjà trop tard. Je faisais moi-même les injections pour qu'il ne soit pas seul. Imaginez s'il avait fait un malaise. Là, au moins, j'étais là.» Dominique Chinour, le président, le regarde et interroge: «Monsieur, qu'avez-vous fait de vos enfants?» Silence. Long. Pesant. Lui aussi a reconnu s'être dopé dans sa carrière.

Parmi les enfants, il y a aussi Sébastien. Moins prometteur que son petit frère, mais bon niveau. Il plonge en 2009. «Quand j'étais à Artix, près de Pau, mon directeur sportif m'a dit que si je voulais avoir des résultats, il pouvait me présenter quelqu'un qui m'obtiendrait facilement des produits.» C'est comme ça que Sébastien se retrouve en contact avec Laurent Dibling, un ancien infirmier militaire blessé par balle au Congo en 2003. «C'est lui qui m'a fourni de l'EPO et des hormones de croissance. Il m'a expliqué comment prendre le traitement pour ne pas me faire avoir.» Les fioles finiront dans les veines de Mickaël. «Je n'ai pas pris moi-même les produits car mon équipe n'a pas participé aux courses que l'on devait faire.» Question du président. «Pourquoi?» «Avoir de la reconnaissance.» Aujourd'hui, Sébastien, 30 ans, roule toujours. Au volant d'un camion. Chauffeur livreur plutôt que cycliste.

Laurent Dibling, c'est l'énigme du dossier. Si l'on en croit les déclarations de Sébastien Larpe, il est le dealer. Celui qui sait comment trouver l'EPO et les hormones hors des circuits légaux. Celui qui file des rendez-vous sur des parkings de supermarché pour livrer la came. Mais Laurent Dibling sert une autre histoire. «J'ai été utilisé par Sébastien Larpe. Les produits, je les ai achetés sur internet, sur un site dont il m'a donné l'adresse. J'ai avancé l'argent et il ne m'a jamais payé.» «Dealer» ou «homme de paille», dit son avocat Benoît Berthaud? Le tribunal tranchera.

Depuis, Mickaël Larpe a repris la compétition. En amateur, soumis à un suivi médical strict. Bilan 2012: 25 victoires. «J'ai de meilleurs résultats aujourd'hui que quand je me dopais.»


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Cette page a été mise en ligne le 20/03/2013