Actualité du dopage



La Sécu ne rembourse pas les cyclistes dopés

19/05/2004 - Libération - Blandine HENNION

Extraits

«Mais il n'est pas malade celui-là, c'est lui qui a gagné le critérium hier !» C'est par cette réflexion d'un contrôleur de la Sécu du Finistère (...) qu'a démarré l'affaire, un lundi matin de la saison 1998. En vérifiant une liasse de prescriptions médicales, envoyées pour remboursement à la caisse primaire d'assurance maladie, il découvre cinq ordonnances de Célestène ou de Kénacort (corticoïdes), de testostérone, d'hormones de croissance, bref, toute la panoplie du parfait dopé. (...)

(...) Le médecin prescripteur est pourtant toujours le même, le Dr Yves Kerrest. Les «malades» ? Cinq cyclistes amateurs finistériens. Le patron de la CPAM du Finistère a pris la chose très au sérieux et, après six ans de procédures et de rebondissements, l'affaire a abouti, le 18 mars, à la condamnation définitive du Dr Yves Kerrest à un an de prison avec sursis, 7 500 euros d'amende pour «mise en danger d'autrui» et aux dépens.

C'est la première fois qu'une affaire de dopage est révélée par l'opiniâtreté d'une caisse d'assurance maladie. Son patron, Yves Le Dantec, n'est pas breton pour rien. «Au début, j'ai porté plainte au tribunal tout en alertant l'ordre des médecins. A ma grande surprise, l'ordre régional, puis national, n'a rien voulu savoir. Ils ont blanchi le médecin(...).» Yves Le Dantec subit un premier échec car sa plainte est classée sans suite.

Mais la CPAM fait son enquête. Son préjudice financier est minime, 150 euros environ. En revanche, la personnalité du médecin étonne (...). «Il s'occupait de 300 sportifs, dont beaucoup de cyclistes. Seuls cinq patients ont demandé le remboursement.» On peut donc penser qu'il dopait plus qu'il ne soignait une jolie clientèle. Personne ne s'en émeut pourtant. Le praticien possède de forts soutiens locaux. N'est-il pas médecin contrôleur à la direction départementale de la jeunesse et des sports ? (...) Au ministère, l'affaire embarrasse. «C'est vrai qu'il était vacataire pour les contrôles antidopage. Mais il a été radié en 2001», confie-t-on chez Jean-François Lamour. Le ministère n'est pas seul en cause. La Fédération française de cyclisme (FFC) ne s'est guère émue de la chose, le médecin étant conseiller d'un club de vélo local. «La FFC est toujours partie civile dans tous les dossiers de dopage depuis 1998. Dans ce dossier, nous ne l'avons jamais vue», confie Yves Le Dantec. A la FFC, on se borne à déclarer que la condamnation définitive est «toujours entre les mains de l'avocat de la fédé».

C'est un deuxième dépôt de plainte de la CPAM, en 2000, qui trouve enfin l'oreille d'un magistrat instructeur de Morlaix. Une expertise démontre que le Dr Kerrest prescrivait «170 fois plus» que la moyenne départementale. Aussitôt, le médecin mis en cause lance une procédure de retraite anticipée et déménage à Rosas, en Catalogne (Espagne), pas très loin de la frontière française. Une étape un peu longue pour l'amateur breton.


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Le post-scriptum de cyclisme-dopage.com

Le 30/12/1970, un jeune docteur exposait ses idées pour "sauver le cyclisme". Son nom : Yves Kerrest !