Actualité du dopage

Épinglé pour dopage, un paracycliste déplore l'inaction des fédérations


06/04/2024 - ici.radio-canada.ca - Kéven Breton

Étoile montante du paracyclisme canadien, Tarek Dahab a rejoint l'équipe nationale en octobre 2023. Une grande victoire pour l'ancien policier natif de Beloeil, qui avait été victime d'un grave accident de la route six ans auparavant. Il en est ressorti avec des vertèbres cassées et d'importants maux de tête, qu'il devait traiter avec de la testostérone. Cette testostérone a ensuite conduit à sa suspension pour dopage.

Le règlement est clair : la testostérone est proscrite par l'Agence mondiale antidopage (AMA). En toute transparence, Tarek Dahab admet avoir participé à plusieurs compétitions de haut niveau, incluant les mondiaux de cyclisme à Glasgow l'année dernière, tout en ayant eu recours à la testostérone, pour lequel il avait une ordonnance. Mais ce n'était pas un secret; la grande majorité de son entourage était au courant.

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Radio-Canada Sports a (...) pu consulter un courriel entre des membres de l'équipe nationale, qui indique que Tarek Dahab a toujours été transparent quant à l'utilisation de ce médicament.

Un athlète peut avoir recours à certaines substances interdites à des fins médicales, à condition d'obtenir une autorisation d'usage à des fins thérapeutiques (AUT). Tarek Dahab a transmis trois demandes au Centre canadien pour l'éthique dans le sport (CCES), chaque fois refusées, mais il continuait de faire partie de l'équipe nationale canadienne malgré tout.

À la mi-novembre, Tarek Dahab se prépare à quitter le pays pour Santiago, au Chili, afin de représenter le Canada aux Jeux parapanaméricains lorsqu'il reçoit la visite de deux membres du CCES, qui procède à un test antidopage. (...)

Le 20 décembre, le verdict tombe : une suspension de quatre ans. (...)

La sanction est toutefois justifiée, avertit le professeur David Pavot, chercheur à la Chaire de recherche sur l'antidopage dans le sport de l'Université de Sherbrooke. « On est en présence d'un athlète qui a des obligations. Et même s'il est de bonne foi, ses autorisations à usage thérapeutique ont été refusées, et il aurait donc dû arrêter ses activités. Il n'a pas respecté les règles, et les règles sont hyper claires. »

L'expert considère toutefois que les fédérations ont manqué à leur devoir en n'encadrant pas mieux leur athlète.

« Les documents que j'avais à remplir étaient compliqués. J'en ai rempli des formulaires en 20 ans comme policier, jamais comme celui-ci », mentionne Tarek Dahab, qui regrette de ne pas avoir reçu des directives plus claires.

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Il maintient aussi que ses bilans sanguins révélaient un taux de testostérone répondant au seuil habituel.

« Des gens à la fédération qui dormaient au gaz »

« Ils savaient qu'il avait des démarches en cours. Que ses premières demandes ont été refusées. Oui, c'est la responsabilité de l'athlète, mais elles [les fédérations] auraient dû l'aider. Il y a du monde là-bas qui dormait au gaz », croit David Pavot, qui est responsable du diplôme de deuxième cycle en gouvernance du sport et antidopage à l'Université de Sherbrooke.

L'arbitre qui a rendu la décision menant à la sanction, Me Patrice Brunet, critique aussi l'inaction des fédérations, tout en rappelant la responsabilité individuelle qui incombe à l'athlète.

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Le directeur général de la Fédération québécoise des sports cyclistes, Louis Barbeau, indique avoir reçu le 29 mars une correspondance de Tarek Dahab qui le laissait croire que le dossier était réglé. (...)

Le DG n'a pas eu de nouvelles de la part du cycliste par la suite. « À partir de ce moment-là, j'étais sous l'impression qu'il allait cesser d'utiliser le médicament en attendant une confirmation d'autorisation, et que s'il compétitionnait, c'est qu'il l'avait reçue. »

Tarek Dahab a seulement informé la fédération canadienne de son refus. « Je faisais partie du programme national. Je relevais d'eux. J'ai donc transmis les lettres de refus, les trois, à la fédération canadienne. »

Cyclisme Canada n'a pas voulu accorder d'entrevue à Radio-Canada Sports (...).

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Un rêve brisé

L'affaire sera à nouveau entendue le mardi 16 avril prochain lors d'une audience préliminaire. Cette fois-ci, c'est Cyclisme Canada qui a porté la décision en appel. Dans un document transmis au Centre de règlement des différends sportifs du Canada, la fédération avance que la suspension de l'athlète pourrait être réduite de quatre à un an, en raison de différents facteurs atténuants.

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Louis Barbeau espère un dénouement heureux et croit qu'il faut faire la distinction entre un athlète qui triche et une personne comme Tarek Dahab, qui a, selon lui, agi de bonne foi tout au long du processus. « La sanction est sévère. Ce n'est pas ma prérogative, mais j'aurais une approche plus nuancée. Il y a une différence entre un compétiteur qui prend des stéroïdes anabolisants, et quelqu'un avec une prescription médicale. »

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Cette page a été mise en ligne le 08/04/2024