Actualité du dopage

L'honneur sauvé de Pedro Delgado


07/1988 - Miroir du Cyclisme

« Le maillot jaune blanchi », une phrase qui était sur toutes les lèvres après l'annonce combien tardive, par le jury international des Commissaires, du « non-dopage » de Pedro Delgado, donc de sa victoire certaine dans le Tour de France 1988. Une décision attendue, donc saluée, mais du bout, du bout des dents. La seule chose qui ne fasse aucun doute, c'est la pureté des intentions du Sévillan. Il n'a jamais su quel produit lui avait été ordonné par le médecin. Sa confiance en la science - et c'est le cas d'une immense majorité de gens de par le monde - est aveugle. Il a suivi le traitement qu'on lui ordonnait, un point, c'est tout. En cela, son élargissement est justice, rien que justice !

Ce qui par contre provoque la gêne, c'est qu'il y avait bel et bien trace d'un produit « douteux » dans la première analyse. Son nom : la probénécide. Un curieux produit, une substance diurétique qui possède la particularité de dissimuler les stéroïdes anabolisants à l'analyse. Substance non dopante en soi mais que le Comité international olympique a interdit précisément parce que sa présence implique l'absorption de dopants que l'on tente ainsi de dissimuler. Et si Pedro a été absous, c'est tout simplement parce que la Fédération internationale de cyclisme n'a pas cru bon de l'inscrire sur sa propre liste des substances prohibées, cela parce que l'utilité d'absorber des anabolisants par les cyclistes n'est pas prouvée.

Alors, Pedro Delgado, le meilleur coureur de ce Tour de France, ce que personne ne nie, n'a pas été frustré de sa victoire inéluctable à Paris. Pour tous, il reste un coureur exceptionnel et un homme formidable. On ne pouvait manquer d'être ému quand il déclarait, irradiant de bonheur après avoir eu connaissance de la bonne nouvelle :

« Je veux tout oublier de cette affaire. Je suis le maillot jaune du Tour. Tout le reste n'a plus d'importance. »

Plus d'importance, voire ? Nombre de questions demeurent posées et Marc Madiot le dit bien quand il déclare :

« Si on n'avait pas, en toute illégitimité, proclamé la nouvelle de la première analyse de Delgado, on n'aurait pas sali le vélo. Car c'est bien de cela dont il s'est agi. Sous prétexte de trouver des « scoops », on ne prend aucune précaution avec l'information et c'est scandaleux. »

Le véritable scandale est là. Pedro Delgado a absorbé un produit non interdit et la contre-expertise l'a prouvé. Si, comme c'est la loi, on avait attendu les résultats de cette contre-expertise, il n'y aurait pas eu d'« Affaire Delgado ». Et il n'y aurait pas eu de doute à faire lever sur ce champion, et sur tous ses pairs les coureurs et sur le Tour de France.


Sur le même sujet


Cette page a été mise en ligne le 11/08/2009